Culture

Elle fait chanter son violon à l’Orchestre symphonique de Montréal

le mardi 22 août 2017
Modifié à 0 h 00 min le 22 août 2017
Par David Penven

dpenven@gravitemedia.com

Interprète chez les premiers violons au sein de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) durant 25 ans, Viviane Roberge a dû réorienter sa carrière pour des raisons de santé. La musicienne de La Prairie, maintenant surnuméraire à l’OSM, s’est entretenue avec Le Reflet. 

 

Comment le violon est-il entré dans votre vie ?

«Vers l’âge de 7 ans, j’ai demandé à mes parents d’apprendre le violon. Mon père en jouait  [alto] et était musicien à l’Orchestre symphonique de Québec. Ma mère était pianiste. Tous les soirs, je m’endormais sur la musique de mes parents jouant des berceuses.»  

 

Ce fut le coup de foudre avec votre nouvel instrument ?

«Pas vraiment [rires], car le violon est un instrument vraiment difficile et complexe. Il y a un million de choses à savoir et à comprendre de cet instrument. Le violon, c’est chantant. La gamme des émotions qu’on peut montrer avec cet instrument est tellement vaste. Petite, je me souviens que je trouvais ça difficile de maintenir le bras en l’air.»

 

«Comment vous vous êtes retrouvée à l’OSM ?»

«Ma professeure universitaire de violon, Sonia Jelinkova, jouait avec l’OSM. Dans sa tête, c’est sûr que j’allais devenir musicienne d’orchestre. Un jour, elle m’a dit qu’il y avait des auditions en tant que violoniste surnuméraire [jouer en remplacement] à l’OSM. J’ai été retenue. Trois mois plus tard avaient lieu des auditions pour rentrer à temps plein et, là aussi, j’ai réussi.  J’avais 21 ans. C’est plutôt rare à cet âge de se retrouver à temps plein dans un orchestre.»  

 

«Étiez-vous heureuse d’avoir été choisie ?»

«Oui et non [rires]. Mon but alors était de poursuivre ma formation aux États-Unis ou en Europe. Mais je ne voulais pas contredire mon professeur. Ça ne se faisait pas. Et une fois engagée, il n’était plus question d’aller ailleurs. Lorsqu’on gagne un poste comme celui-là, on ne sait pas quand l’occasion va se représenter. On ne peut plus lâcher par la suite, ça devient une espèce de drogue. L’OSM est l’un des meilleurs orchestres au monde. Nous avons joué dans plus d’une vingtaine de pays.»

 

«Est-ce difficile de travailler avec autant de musiciens ?»

«Chez les premiers violons, on est 16 musiciens qui interprètent tous la même partition. Je dois m’écouter, ainsi que les 15 autres violonistes, sans oublier l’ensemble des musiciens de l’orchestre. La musique que je joue doit se fondre dans la masse. Notre travail, c’est de suivre les moindres désirs de notre chef d’orchestre [Charles Dutoit].»

 

«Combien d’heures de pratique par semaine consacrez-vous au violon ?»

«Durant mes études, au moins quatre heures par jour. C’était difficile sur le plan mental et sur le plan physique. Je devais travailler fort. À l’OSM, j’avais 20 heures par semaine de travail réparti sur huit répétitions sans compter les pratiques à la maison. Ce temps pouvait varier selon la difficulté des pièces à jouer.»

 

«Vous avez fait toute votre carrière avec Charles Dutoit et maintenant sur appel avec Kent Nagano. Comment sont-ils ?»

«Charles Dutoit est un grand musicien. Avec lui, il n’avait jamais de musique ennuyante. Il était très exigeant et travaillant. Il y avait une intensité musicale. Ken Nagano montre toujours son appréciation avec les musiciens. Il donne à chaque interprétation son feedback.»

 

«De 1979 jusqu’à 2004, vous étiez avec l’OSM. Pourquoi vous avez quitté l’orchestre ?»

«J’ai eu des tendinites intérieures et extérieures dans les coudes, ce qui est fréquent pour un violoniste de carrière. Les premières douleurs se sont manifestées proche de la trentaine. Vers la fin, j’ai accepté de me faire donner une injection de cortisone. Je n’ai plus eu mal pendant trois mois, puis la douleur est revenue. C’était, pour moi, le coup de grâce. Je suis combative et il fallait que je me trouve un autre emploi. Je savais que j’allais devenir enseignante. Il y a eu une ouverture pour le cégep de Sherbrooke où j’enseigne depuis.»

 

«Vous avez recommencé à jouer avec l’OSM ?»

«Oui, depuis environ 2010. Lorsqu’un est surnuméraire, on peut vous appeler le matin même de la première répétition. Mon plus récent concert avait lieu début d’août au Festival de Lanaudière alors que nous avons joué la symphonie no 2 de Brahms. Si mon compositeur préféré est Prokofiev [Sergueï], j’adore jouer Brahms [Johannes]. Ses pièces ont une intensité émotionnelle. Ça me séduit absolument.»

 

 

Trois conseils pour apprendre le violon, selon Viviane Roberge

- Travailler fort.

- Être passionné.

- Être assidu dans ses pratiques.

 

 

Parcours académique de Viviane Roberge

1966 à 1975: Conservatoire de musique de Québec et de Montréal.

1975 à 1981: Université McGill, Licentiate en 1979 et Concert Diploma non terminé jusqu’en 1981.

«Je poursuivais mes études tout en travaillant à l’OSM», précise Mme Roberge.