Opinion

Juste à temps

le mercredi 18 novembre 2015
Modifié à 0 h 00 min le 18 novembre 2015

Voici le billet du 18 novembre de Hélène Gingras

Êtes-vous du genre prévoyant? Je ne pouvais pas arriver en retard. Les mots de mon courriel tournaient en boucle dans ma tête. Je serai là «sans faute». Ça voulait dire quoi qu'il arrive. C'est ce que j'avais écrit à mon patron. Je n'allais pas manquer ma parole. Ni non plus être en retard pour un tel contretemps. Ou avoir l’air de celle qui a des défaites. Je déteste les gens qui ne sont pas fiables. J'avais googlé le chemin. Comme lorsque je vais quelque part pour la première fois. J'avais estimé le temps requis pour m’y rendre. Additionné les minutes nécessaires pour me préparer. Puis, j'avais mis le réveille-matin un peu plus tôt. Question d'avoir une vingtaine de minutes de jeu. Comme me l’a toujours conseillé ma mère… Un peu de temps d’avance. Advenant que je me perde. Qu’il y ait un bouchon sur l’autoroute. Une tempête de neige. Au cas où j'aurais besoin de ressortir le fer à repasser au dernier instant pour effacer un mauvais pli. Sinon, pour me changer parce que je me suis salie en mangeant un yogourt. Ça ne risque plus de m'arriver, je m'habille désormais après le petit-déjeuner et après avoir brossé mes dents. J'ai eu ma leçon… Moi qui bois peu de café, j'envisageais de me ramasser un espresso pour le siroter chemin faisant.   Quelque part autour de 7h20. Mon voisin qui cogne à la porte et me dit: «tu as un flat». Non, c’est une blague! Ça ne se peut pas. Pas ce matin. Je dois être à Saint-Hubert pour 8h30. Sans faute. La loi de Murphy. Mon avance fond comme neige au soleil. Je n’ai plus une minute à perdre. J’arrive au garage complètement survoltée. À croire que j'ai bu une cafetière complète! Faisant les 100 pas devant le comptoir. Il m'a semblé qu'il a fallu une éternité à l'employé pour monter ma voiture sur la plateforme et dégager ce je-ne-sais-quoi qui était coincé dans mon pneu. J'essayais de respirer. De me raisonner intérieurement. J'arriverai en retard de quelques minutes. Au pire. Mais je serai là «sans faute». Ce n'est pas ce à quoi je m'étais engagée, non? Chemin faisant, je me répétais la même chose. Puis, j'ai fini par me rendre sans trop exagérer sur la pédale. Pile à l'heure. Les cheveux un peu ébouriffés, j'en conviens. Je n’ai jamais aussi bien investi du temps en trop!