COVID-19

Un inhalothérapeute au cœur de la bataille contre la COVID-19

le mardi 19 mai 2020
Modifié à 21 h 18 min le 19 mai 2020
Par Vicky Girard

vgirard@gravitemedia.com

Un patient porteur de la COVID-19 se présente à l’urgence d’un hôpital. Il est en difficulté respiratoire. Il faut vite recourir aux services d’un inhalothérapeute. Marc Lefebvre, un Constantin qui pratique ce métier depuis 37 ans à l’Hôpital LaSalle, témoigne de son travail sur la ligne de front. Au début de la crise, la Ville de LaSalle était une zone chaude. Les patients en état critique et les décès se sont accumulés. M. Lefebvre ne peut chiffrer ceux-ci. Néanmoins, la vague a été intense, puis s’est maintenant stabilisée, dit-il. «Beaucoup [de membres du personnel] ont été troublés de faire face à ces situations. Ce n’était pas facile. Je me souviens qu’un après-midi, on a intubé trois patients en deux heures», laisse savoir l’inhalothérapeute, ajoutant que c’est un nombre élevé en si peu de temps. Lorsque les premiers cas de COVID-19 sont apparus au Québec, les hôpitaux ont ralenti leurs activités régulières. Le personnel devait se préparer. De nouveaux protocoles ont été mis en place et des simulations ont été effectuées grâce à des recherches sur ce qui se faisait dans les pays gravement touchés. «On s’est préparé au pire. Comme si on partait en guerre. J’ai vraiment vécu ça comme le débarquement de Normandie. La maladie arrivait chez nous», raconte M. Lefebvre. Telle une équipe sportive, le personnel soignant était filmé, puis évalué par des experts pour s’ajuster. Les procédures sont devenues plus rapides, synchronisées et sécuritaires. De l’équipement et des salles d’opération réaménagées étaient également prêts «en cas de tsunami».
«Je n’avais jamais vécu quelque chose comme ça. Il m’est arrivé de me sentir comme dans séries américaines comme ER ou Grey’s Anatomy.» -Marc Lefebvre, inhalothérapeute
Nouveaux protocoles Les inhalothérapeutes ont dû revoir certaines de leurs méthodes. Comme les patients atteints de la COVID-19 ont un taux anormalement bas d’oxygène quand ils sont en détresse, ils doivent agir vite, mais pas comme ils en avaient l’habitude. «Même en essayant de corriger par des moyens classiques en donnant de l’oxygène ou en ventilant manuellement, ça ne se corrige pas. Au contraire, ça se détériore rapidement», explique M. Lefebvre. Dans les pires cas, l’intubation devient nécessaire afin de mettre le patient sur un «respirateur». Le patient se retrouve dans un coma artificiel. Présentement, cette procédure doit être effectuée dans une chambre à pression négative afin de diminuer la propagation des gouttelettes en aérosol. «Ça demande plein d’énormes précautions que nous n’avions pas à prendre avant pour que le personnel ne soit pas contaminé», laisse savoir l’inhalothérapeute. Il faut notamment que les intervenants médicaux restent le plus loin possible du visage du patient et que les médicaments soient préparés d’avance. Il reste environ un mois à l’inhalothérapeute avant sa retraite. Celui-ci était déjà en préretraite. Il est passé de trois jours par semaine à un horaire à temps plein pendant la crise et à des quarts de travail de 8 à 12 heures. Il sait qu’il terminera sa carrière «dans la COVID-19». Un métier méconnu  On compte environ 4 000 inhalothérapeutes au Québec. Marc Lefebvre considère que son métier est méconnu. Ceux-ci font de l’assistance en anesthésie, en soins intensifs, en cardiologie et à l’urgence dans les hôpitaux. Ils sont également actifs en soins néonataux dans les pouponnières. Ils aident aux soins à domicile et dans des cliniques privées, puis en laboratoires d’apnée du sommeil et chez les dentistes. «C’est une profession assez jeune. Ça fait 50 ans que les premiers inhalothérapeutes ont gradué. C’est une profession qui prend de l’ampleur et qui évolue avec la technologie», explique M. Lefebvre qui fait partie d’une équipe d’environ 15 inhalothérapeutes actifs. Le métier fait également partie de la liste gouvernementale d’emplois en manque de main-d’œuvre.