Faits divers

Une femme témoigne du calvaire qu’elle a vécu

le vendredi 01 mai 2015
Modifié à 0 h 00 min le 01 mai 2015
Par David Penven

dpenven@gravitemedia.com

LA PRAIRIE - Mélanie (prénom fictif) a connu la peur, la violence et la faim. Cette mère a vécu sous l’emprise d’un conjoint agresseur. Avant que les policiers n’interviennent, elle survivait dans une minuscule chambre d’un motel de la Rive-Sud essayant de nourrir ses deux jeunes enfants et leur père à raison de 10$ par semaine.

Installée dans les bureaux du Complexe Le Partage à La Prairie, elle se remémore cet épisode douloureux.

«Je suis une femme qui a toujours su s’organiser dans la vie. Je ne comprends pas ce qui a pu m’arriver. Ma relation avec cet homme, je devrais dire le cercle de violence, a duré plus de cinq ans. Je travaillais, mais j’ai quitté mon emploi, puisque je suis tombée rapidement enceinte», raconte la femme dans la quarantaine.

Son compagnon qui éprouve des problèmes de toxicomanie, ne travaille plus. Faute de revenus, la famille qui possédait une maison emménage dans un appartement en 2011. À partir de ce moment, les événements vont aller de mal en pis. Ne pouvant de nouveau payer le loyer, ils sont évincés de leur logement en plein mois de janvier.

«C’était en 2012. On était dehors à -20 Co. Tout est saisi. Que l’on prenne le poêle, le frigidaire, ça ne me dérangeait pas, mais les souvenirs… Je ramassais mes effets: du linge, trois ou quatre autos miniatures des garçons et leurs paires de jeans. C’est à eux que je pensais. Juste à eux.»

La famille a alors été hébergée chez la mère de son conjoint.

«La violence physique avait beaucoup augmenté. Personne de sa famille ne faisait rien pour nous aider. Je voulais tomber malade, avoir un accident. Mais je me disais non à cause de mes enfants. Où était la porte de sortie?»

Motel

La famille s’est retrouvée dans la chambre d’un motel où elle a habité de mai à juillet. Mélanie faisait le ménage chez un ami pour 60$ la semaine. Une partie de ce montant servait à payer le journal, le café et le tabac du père de ses enfants.

«Le matin, on mangeait une toast. Le midi et le soir, c’était les paquets de nouilles sèches à 20 cents. Il y avait du gruau, du pain et de l’eau. Je lavais le linge dans la baignoire. Le pire, c’est les enfants (alors âgés de 3 et 4 ans). Jamais ils ne se sont plaints. Jamais», souligne-t-elle la voix étranglée par l’émotion.

Un client du motel a été témoin du drame que vivait Mélanie. Malgré ses antécédents judiciaires, il a communiqué avec la police pour leur signaler la situation.

«À leur arrivée, je voyais la peur dans les yeux de mon conjoint. Il voulait que je nie qu’il me frappait, mais j’avais des marques. Je pesais 100 lb (45 kg) toute mouillée. J’ai mis les vêtements, les jouets des enfants dans des sacs d’épicerie. Ça faisait sept sacs. Ma vie se résumait à ces sept sacs.»

Lumière

Mélanie et ses enfants ont séjourné au pavillon Marguerite-de-Champlain à Saint-Hubert, puis à la maison d’hébergement et de transition l’Égide de La Prairie. Elle a dû composer avec l’insomnie, les maux de tête et le stress découlant de toutes ces années de violence, mais surtout retrouver «sa dignité», comme elle le dit.

Ayant aménagée depuis décembre 2013 dans un logement subventionné à La Prairie, elle doit composer avec un revenu mensuel d’environ 1600$. En tant que participante au programme PAAS-Action d’Emploi-Québec destiné aux prestataires d’aide sociale elle doit elle s’impliquer comme bénévole. Ce qu’elle fait au Complexe Le Partage. Une façon pour elle de se réinsérer socialement. Durant l’entretien, elle remercie à plusieurs reprises Le Partage.

«Je réapprends à vivre. J’ai commencé les cuisines collectives et j’y ai pris goût. Il faut budgétiser pour y arriver. Chez moi, il n’y a pas de télé. On sort, on fait des randonnées, du sport. Je ne suis pas matérialiste. Je suis quelqu’un tourné vers l’essentiel.»

Elle souhaite obtenir son attestation d’études collégiales pour devenir travailleuse sociale ou éducatrice spécialisée. Elle se donne sept ans pour y arriver, le temps que ses enfants finissent leur primaire.

«Il faut que ça bouge. Une partie de ma vie a été volée, il y a une forme de rattrapage.»