Opinion

Billet d’humeur : Avoir la peste

le mercredi 18 mai 2022
Modifié à 8 h 42 min le 17 mai 2022
Par Hélène Gingras

hgingras@gravitemedia.com

Mes collègues Lyne Bourgeois, conseillère en publicité au Reflet, Mario Pitre, chef de contenu au Journal Saint-François, et Guillaume Gervais, journaliste au Reflet, et moi lors du Grand McDon pour lequel nous avons recueilli des fonds. (Photo: Le Reflet – Hélène Gingras)

Vous est-il déjà arrivé de vous sentir rejeté?

J’ai été bénévole pendant deux heures au Grand McDon qui se déroulait partout au Québec, mercredi dernier. Comme plusieurs de mes collègues qui ont participé à la cause. Que soutient notre employeur, Gravité.

Je n’ai pas d’enfant, mais je pense qu’il faut tout faire pour alléger la vie de celui-ci. Préserver son innocence et son enfance, qui devrait être de jouer avec ses amis, faire du vélo ou éclater des pétards (sur une bordure de trottoir avec une roche comme je le faisais quand j’étais petite). Et non pas de subir de la chimiothérapie, d’avoir dormi plus souvent à l’hôpital que dans son lit ou de connaître les termes scientifiques des maladies graves.   

J’étais postée à un feu de circulation achalandé à l’heure de pointe du soir, au retour à la maison des travailleurs, chaudière à la main. Un dossard pour être vue de loin, de tous.

Je dois souligner la générosité de nombreux automobilistes qui n’hésitaient pas à piger dans leur portefeuille ou entre leurs deux sièges à la recherche d’argent en papier ou de monnaie qui trainait. Quitte à ralentir un brin la circulation pour faire leur don.

J’allais et venais à côté des voitures quand elles étaient arrêtées au feu de circulation au rouge. Saluant les automobilistes. Engageant parfois la conversation avec certains qui voulaient connaître la cause de la collecte ou seulement parler de l’été qui nous était tombé dessus d’un seul coup. Certains s’excusaient de n’avoir pas d’argent comptant sur eux; ce que je comprenais tout à fait. De toute manière, je ne forçais personne à donner.

Je saluais tout un chacun par un sourire. Ceux qui croisaient mon regard à tout le moins. Parce que c’est ce qui m’a frappée le plus: les automobilistes qui faisaient semblant de ne pas me voir. Comme si je n'avais pas existé. Pire, comme si j’étais une pestiférée qu’il fallait absolument ne pas regarder sous peine de devenir aveugle.

À quel point c’était flagrant? Je n’ai jamais vu autant de conducteurs s’immobiliser si loin de la ligne d’arrêt de peur de se retrouver à ma hauteur! D’autres regarder autant la route devant eux sans broncher! C’en était ridicule. Je n’ai pourtant pas agressé personne ce jour-là.

Je ne sais pas quand c’est devenu acceptable d’ignorer quelqu’un par peur de lui dire non.

«Nous ne devrions pas craindre la différence, le plus à craindre, c’est l’indifférence.»

-Christopher Tavernier