Opinion

Deux poids, deux mesures pour la culture et sa relève

le samedi 27 février 2021
Modifié à 14 h 33 min le 23 février 2021
Par Yanick Michaud

ymichaud@gravitemedia.com

Depuis le début de cette pandémie, le milieu culturel s’est fait dire par toutes les tribunes qu’il devait se réinventer. Mais comment peut-on être créatif lorsqu’on a des bâtons dans les roues ? Bien qu’il soit primordial de respecter les règles en place pour éviter les décès et la surcharge de nos centres hospitaliers, nous ne pouvons pas mettre tout sur pause pour une période indéterminée. Nous avons constaté que les milieux professionnels sportifs et culturels ont pu reprendre certaines activités en relevant des défis qui, jusqu’à présent, semblaient insurmontables. Depuis janvier, il a été démontré à maintes reprises qu’il était essentiel que le milieu collégial reprenne une vie quasi normale. Le 4 février dernier, le gouvernement a annoncé des assouplissements tant attendus par le milieu de l’enseignement supérieur. Néanmoins, il semble que pour nos décideurs et décideuses, la seule composante de cet important écosystème soit la pédagogie. Les dirigeants et dirigeantes du Réseau intercollégial des activités socioculturelles du Québec (RIASQ), dont émanent plusieurs artistes de la scène culturelle du Québec, ont dû faire une croix sur Cégeps en spectacle, assurément le plus grand concours de la relève artistique au Québec dans les murs de ses 75 établissements d’enseignement collégial. Ce n’est que la pointe de l’iceberg, car d’autres annulations ont précédé et d’autres encore suivront. Comment se réinventer quand on apprend à créer ? Comment s’exprimer quand on est confiné ? Enfin, comment briser l’isolement en ne permettant que d’étudier ? Les assouplissements annoncés ne sont tout simplement pas suffisants. Ils sont aussi inéquitables. Il est possible pour des comédiens professionnels de jouer en direct à la télévision pendant plus de 90 minutes, mais on ne permet pas à six collégiens et collégiennes de se réunir pour pratiquer leur art selon des mesures sanitaires strictes. On permet à trois chanteuses professionnelles de chanter leurs grands classiques pendant plus d’une heure en différé, mais le même concept avec les mêmes mesures sanitaires est refusé aux participants et participantes de Cégeps en spectacle pour un numéro de 10 minutes ! Il s’agit d’un non-sens. La question ici n’est pas de dénoncer la tenue des prestations auxquelles nous nous référons (bien au contraire !) ou de permettre l’impossible : nous demandons seulement d’être soumis aux mêmes règles que celles qui sont exigées pour les activités dites pédagogiques ou encore pour le milieu professionnel des arts de la scène. Le RIASQ est au service de 200 000 étudiantes et étudiants qui attendent des réponses. Nos artistes en devenir sont freinés dans leur élan. Dans le seul endroit en Amérique où le français est la langue première, la culture est ce qui fait des Québécoises et des Québécois des gens uniques. La culture est un phare, elle est représentative de notre société : elle présente nos visages, nos émotions. On y ressent notre fierté, notre épanouissement sociétal ; d’ailleurs, la seule activité autorisée pendant la période des Fêtes était notre Bye bye. Alors que la santé mentale est au cœur des préoccupations de notre société, que nos étudiants et étudiantes aux études supérieures sont laissés en plan, il faut agir et ramener nos activités parascolaires. Le peuple québécois ne doit pas négliger sa relève culturelle : les activités du RIASQ telles que Cégeps en spectacle sont là où les artistes émergents sont nés. Là où des talents ont été découverts. Il y va du bien-être de notre culture. Il y va de la réussite éducative et de la santé mentale de nos jeunes. Et il y va de l’équité et de l’équilibre de notre société.

Les cosignataires:

Émile Bilodeau, auteur-compositeur-interprète et porte-parole du RIASQ Gregory Beaudin, comédien et rappeur (Dead Obies) Cindy Bédard, autrice-compositrice-interprète Mélissa Bédard, interprète et comédienne Lydia Bouchard, danseuse, chorégraphe et metteuse en scène Simon Boulerice, auteur Mehdi Bousaidan, humoriste Philippe Brach, auteur-compositeur-interprète Jean-François Chagnon, réalisateur Valérie Chevalier, animatrice Jo Cormier, humoriste Jeanne-Renée D. Lorrain, responsable du développement des publics FTA Jipé Dalpé, auteur-compositeur-interprète Jean-Marc Dalphond, comédien Maxime De Cotret, comédien Mathieu Dufour, humoriste Martin Faucher directeur artistique et codirecteur général FTA Pier-Luc Funk, comédien et animateur Stéphane Franche, comédien François Gilbert, auteur Jean-Sébastien Houle, musicien (La Famille Ouellette) Laurence Lafond-Baulne, autrice-compositrice-interprète (Milk&Bone + Soft Fabric) Ève Landry, comédienne David Lavoie, directeur administratif et codirecteur général FTA Nicolas Michon, auteur et comédien Christine Morency, humoriste Marie-Ève Morency, comédienne Dominic Montplaisir, comédien, réalisateur, scénariste et monteur Isabelle Paquette, ex-danseuse des Grands Ballet Canadiens, soliste Justine Philie, autrice Guillaume Pruneau, ex-danseur des Grands Ballet Canadiens, soliste Jonathan Roberge, humoriste et animateur Ariane Roy, autrice-compositrice-interprète Phil Roy, humoriste Étienne St-Laurent, directeur général Vu sur la Relève Arnaud Soly, humoriste Roby Talbot, pianiste compositeur Olivier Thivierge, auteur