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Ford Edge ST 2019 : nous en sommes rendus là

le jeudi 11 octobre 2018
Modifié à 11 h 05 min le 11 octobre 2018
Le Guide de l'Auto
Article par William Clavey

SALT LAKE CITY, Utah – En tant que journalistes, il est de notre devoir de mettre de côté les opinions subjectives et de prioriser l’objectivité. Mais il arrive des moments où il est difficile de garder notre sang-froid tellement le sujet couvert est outrageux.

Prenons le véhicule à l’essai ici, le Ford Edge ST 2019. Le fait de voir les lettres ST – un écusson longtemps synonyme de légèreté et de maniabilité – estampées sur un utilitaire avec une masse nette de plus de 4 000 lb (1 800 kg), est un peu déroutant, surtout pour un passionné de l’automobile. De plus, le fait que les Fiesta ST et Focus ST continueront d’être commercialisées en Europe, mais pas chez nous, est particulièrement désolant. Mais restons calmes. Le but premier d’un bon journaliste étant d’informer les lecteurs, informons : mesdames et messieurs, nous en sommes rendus-là, au royaume des VUS! Après tout, vous l’avez demandé. Et le Edge ST n’est rien de plus qu’une inévitable évolution de marché.

Parlons de performance
Chez Ford, ST signifie Sport Technologies et fait référence à un héritage de course qui a vu le jour à la fin des années soixante-dix, en Europe, avec la Ford Escort RS1800, une petite bombe de rallye qui a remporté quelques championnats à elle seule. Et ça a perduré. On a ensuite vu des machines encore plus intenses, comme la Ford RS200, dans les années 80, suivies de bolides de course homologués pour la route, comme la Sierra et l’Escort Cosworth, puis la Focus RS.

Ce n’est qu’en 2013, avec la Focus ST, que la première déclinaison à haute performance européenne de Ford est arrivée sur nos routes, suivie de sa petite sœur, la Fiesta ST, en 2014, et de la Focus RS, en 2016.

Bien que ces petites perles fussent adorées par les amateurs de performance, elles n’enregistraient pas des ventes très épatantes par ici, même en déclinaisons ordinaires. La Focus sera donc tristement retirée de notre marché à la fin de 2018. Pour ce qui est de la Fiesta, dépêchez-vous si elle vous intéresse, car elle restera chez nous une autre année avant de s’enfuir en Europe.

Dorénavant axé sur la commercialisation de VUS, Ford concentre inévitablement ses efforts sur ses modèles populaires. L’Edge en est un, et la déclinaison ST tentera, du moins, c’est que croit Ford, de maintenir la flamme ST vivante chez les consommateurs nord-américains.

On a effectivement affaire à un véhicule entièrement différent. Le ST remplace l’Edge Sport, mais se voit tout de même alimenté par le V6 biturbo EcoBoost de 2,7 litres, sauf qu’il développe désormais 335 chevaux, 20 de plus que dans le Sport. Le couple a aussi été considérablement augmenté à 380 lb-pi (+30 lb-pi). L’Edge ST vient de série avec le rouage intégral, un système capable de désactiver le train arrière au besoin, ainsi qu’avec une toute nouvelle boîte automatique à huit rapports.

C’est la même boîte que dans le Ford Edge 2019 ordinaire, sauf que sa programmation a été repensée. Celle-ci est également refroidie à l’eau pour l’aider à mieux encaisser le couple augmenté.

On a renforcé le châssis et incorporé des ressorts plus fermes ainsi que des amortisseurs plus réactifs à la suspension. Les freins sont plus gros, sans faire appel à un équipementier externe, comme Brembo, par exemple. Il est même possible d’obtenir des freins plus performants, en option.

L’Edge ST se démarque esthétiquement par une grille et des roues noircies – montées sur des pneus haute performance Pirelli P Zero –, des étriers de frein rouges, des pare-chocs et effets de sol plus agressifs, des sièges sport et une finition d’habitacle en fibre de carbone.

Et alors?
Nous avons conduit l’Edge ST 2019 dans l’État d’Utah, où le paysage montagneux parsemé de routes sinueuses constituait le terrain de jeux idéal pour le mettre à l’essai. Dès le premier virage, on remarque immédiatement un châssis plus ferme, une suspension plus raide, diminuant de façon significative l’effet de roulis. La direction est également plus lourde et réactive que sur un Edge conventionnel, ce qui encourage la conduite sportive.

Plus j’allais vite, plus je me sentais en contrôle, et même lors des virages en épingle qui longeaient des falaises aux vues magistrales, l’Edge s’est montré apte à performer malgré le gros V6 qui reposait sur son train avant. Sa force, c’est sa transmission intégrale et ses énormes pneus qui lui octroient un niveau d’adhérence plus que suffisant pour lui permettre de se catapulter en sortie de virage. Bref, l’Edge ST possède une calibration de châssis, une suspension et des freins dignes des meilleurs produits ST. Il colle tout simplement à la route. Jusque-là, tout va bien.

C’est au niveau de la motorisation que les choses déçoivent. L’Edge est lourd, et même si son V6 profite d’un couple de près de 400 lb-pi, on a tout de même l’impression qu’il s’essouffle. Les accélérations ne sont pas si épatantes que ça, étant donné les prétentions sportives de l’utilitaire. En fait, lorsque l’on appuie sur le champignon, on se dit qu’un Acura MDX avec son moteur V6 atmosphérique ne serait pas si différent que ça.

Ensuite, il y a la sonorité du moteur qui, bien entendu, a été amplifiée par les haut-parleurs afin d’augmenter « les sensations fortes ». Le problème, c’est que ce V6 n’émet pas un son très mélodieux au préalable. On a plus l’impression d’entendre un gros nounours se lamenter dans l’habitacle. En conduite dynamique, où on le sollicite davantage, ça devient rapidement désagréable. Ironique.

Et que dire de la boîte automatique à huit rapports? Ce qui est étrange, c’est qu’elle fonctionne à merveille dans l’Edge alimenté par le quatre cylindres, mais ici, elle dispose d’un délai fâcheux avant de rétrograder. Même que dans certains cas – les cas les plus importants comme en sortie de virage – elle refuse de passer à un rapport inférieur! Très fâchant! Peut-on attribuer ce bémol à un couple trop élevé pour une boîte automatique à prime à bord conçue pour un quatre cylindres?

Les gens de Ford n’avaient pas de réponse à me donner, mais ils ont avoué qu’elle éprouvait quelques lacunes de ce côté.

Tout ça réuni fait en sorte que l’Edge ST ressemble plus à un Edge « sportif » qu’&agra ve; une véritable machine de guerre pour les circuits de course. Contrairement aux bolides ST qui l’on précédé, qui encourageaient la conduite extrême par une harmonie châssis/moteur insécable, le Ford Edge ST est un véhicule maladroitement conçu et pas très rapide.

Avec un prix de départ de 49 099 $ avant les frais de transport et préparation, le nouveau jouet de Ford coûte cher. Certes, on prétend chez le constructeur que dans cette gamme de prix, on ne retrouve rien de semblable en matière de performance et de polyvalence. Et c’est vrai!

En dépit de la déclaration de Ford comme quoi son Edge ST 2019 est apte à rivaliser des véhicules comme l’Audi SQ5, le BMW X3 M40i, le Jaguar F-PACE S et le Porsche Macan S à moindre prix, la triste réalité est qu’il ne leur arrive même pas à la cheville…