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COVID-19

Impression 3D: une entreprise de Longueuil crée des milliers de visières de protection

le dimanche 24 mai 2020
Modifié à 10 h 44 min le 22 mai 2020
Par Ali Dostie

adostie@gravitemedia.com

https://www.dailymotion.com/video/x7u1xdr Malgré le retour en classe repoussé, il y a de l’action au Centre d’éducation aux adultes Le Moyne-D’Iberville, dans l’arr. du Vieux-Longueuil. L’équipe d’HERO Créations y a élu domicile pour produire des visières de protection par imprimantes 3D. Maxime Mathurin et Hugo Pelletier, les deux cofondateurs de la jeune entreprise d’impression 3D spécialisée dans les produits récréatifs (maquettage, figurines, accessoires), ont voulu s’impliquer dans la lutte contre la COVID-19. M. Mathurin est infirmier à la clinique de gériatrie du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), M. Pelletier est technicien en bâtiment à la Commission scolaire Marie-Victorin. Ils ont approché la CSMV pour savoir si elle était intéressée à prêter ses locaux du centre d’éducation, muni d’un «Fab Lab» (un laboratoire de fabrication), qui semblait le lieu tout indiqué pour se lancer dans la production de visières de protection. Celles-ci sont dédiées en priorité au milieu de la santé, mais suscitent aussi l’intérêt d’institutions et de citoyens. «Il y a eu une synchronicité des idées. La Commission scolaire voulait elle aussi s’impliquer pour la COVID-19, alors elle a été super favorable. Ça s’est fait en quelques jours», explique M. Mathurin. À grande échelle Depuis le début avril, des imprimantes 3D fonctionnent à plein régime – jour et nuit – dans le gymnase et la cafétéria du centre. Jusqu’ici, entre 7000 et 8000 visières ont été fabriquées, à raison de 300 par jour. En transposant son mode de création habituel à celui des visières, HERO Créations se retrouvait face au défi de passer à une production à grande échelle. Il faut deux heures à une imprimante 3D pour créer la couronne de plastique qui entoure la tête. D’où l’importance, pour atteindre une capacité de production satisfaisante, de se doter de plusieurs de ces équipements. La CSMV a fourni en tout 80 imprimantes, qui s’ajoutent à la trentaine d’HERO Créations et aux quatre offertes par la Ville de Longueuil. En plus d’une quinzaine d’imprimantes en commande, «on est en négociation pour 100 de plus», soutient M. Pelletier. Après la pandémie, il restera une trace de cette implication de plusieurs partenaires. La CSMV déploiera dans ses écoles les 80 imprimantes achetées, et celles acquises par la Ville de Longueuil seront mises à la disposition des usagers de la bibliothèque Georges-Dor, dans le cadre des activités de son laboratoire de création numérique, le «PixiLab». À la chaîne [caption id="attachment_91526" align="alignleft" width="404"] Le cofondateur Hugo Pelletier[/caption] Au premier coup d’œil, ces dizaines d’imprimantes semblent, dans un ronronnement régulier, faire tout le travail d’elles-mêmes. Ce n’est pas tout à fait le cas. La création d’une visière commence à l’ordinateur, où un modèle de visière est imaginé. HERO Créations s’est basé sur le modèle Prusa, conçu en République Tchèque, auquel ils ont apporté quelques modifications. Un logiciel transforme ensuite ces données en codes. «On choisit les configurations de l’imprimante, on choisit le plan de vitesse, la chaleur…», décrit M. Pelletier. L’appareil crée alors par étage la couronne, dont le matériel de base est un fil de thermoplastique. Chacune de ces couronnes passe en post-production: les défauts sont sablés pour assurer le confort, le tout, à la main. Une station est réservée au montage des sacs, dans lesquels se trouve l’écran facial, le renfort à installer sous la visière et les élastiques. La visière n’est pas assemblée, afin de faciliter l’entreposage et le transport. En plus de quelques bénévoles, les deux cofondateurs peuvent compter sur une dizaine d’employés, dont des élèves du secondaire ou du Centre de formation aux adultes. «Certains se sont lancés dans la production pour la pandémie avec un modèle qui repose plus sur le bénévolat. Nous, on voulait une chaîne durable, relève Maxime Mathurin. Si jamais il y a d’autres vagues, nous serons en mesure de produire.» Le but d’HERO Créations est d’atteindre la rentabilité, sans forcément viser les profits, pour offrir un produit accessible. Les visières se vendent au coût de 5$. Une vaste clientèle Ces visières sont destinées en priorité au milieu de la santé. Le CHUM et l’hôpital Charles-Le Moyne en ont reçues et des démarches sont en cours du côté de l’hôpital Pierre-Boucher. «C’est très flexible. Un hôpital peut demander des modifications, selon ses besoins. La chaîne de production peut être changée de façon ultrarapide», assure Hugo Pelletier. Depuis le début, la visière a fait l’objet de 18 révisions.

«L’impression 3D, c’est une bénédiction: tant que tu as des idées, tu peux tout faire.» -Hugo Pelletier, cofondateur de HERO Créations
Les deux cofondateurs ont été étonnés de constater l’éventail d’acteurs du milieu institutionnel – dont le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest! – et de personnes intéressées par leurs visières, qui ont obtenu l’homologation de Santé Canada. En ce moment, 5500 visières ont été commandées par la CSMV. «Avec le retour à l’école qui est repoussé, il n’y a pas moins de commandes, mais elles sont moins urgentes», souligne M. Mathurin. Avec l’ouverture des commerces et le déconfinement progressif à venir, des commerces tels que des dépanneurs ou des salons de coiffure s’ajoutent à la liste d’acquéreurs, tout comme des citoyens qui veulent en faire usage au moment de faire des courses. «La visière ne remplace pas le masque, mais certains ne le tolèrent pas, alors c’est mieux que rien», soulève Maxime Mathurin. Ces visières sont conçues pour être jetables, mais peuvent servir pour plus d’une utilisation. En milieu hospitalier, elles peuvent se porter pendant cinq jours. «Lorsque l’écran facial est souillé, la consigne à l’hôpital serait de jeter la visière, expose M. Mathurin. Mais on offre des pièces de remplacement.» La production et la créativité d’HERO Créations ne s’arrêteront pas là. Déjà, l’entreprise et la Commission scolaire œuvrent à la mise en place d’une équipe de couturières pour concevoir des couvre-visages, à même les murs du Centre d’éducation aux adultes.