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Élections 2019

La bête politique a réussi son retour dans l’arène

le vendredi 08 novembre 2019
Modifié à 14 h 41 min le 08 novembre 2019
Par Audrey Leduc-Brodeur

aleduc-brodeur@gravitemedia.com

Rencontré quatre jours après sa victoire aux élections fédérales, Alain Therrien a troqué le veston pour une allure plus décontractée. Loin de l’ambiance survoltée qui régnait à l’annonce de sa victoire au M Resto-bar, le 21 octobre, le nouveau leader parlementaire de son parti ne cesse pas de sourire pour autant. Le politicien aguerri a le cœur à la fête, mais aussi la tête au travail. Avec sa verve habituelle, le député fédéral de La Prairie a répondu aux questions du Reflet. Le 1er octobre 2018, vous avez dit au Journal que vous quittiez la politique «à tout jamais». Pourtant, vous voici élu député fédéral. Qu’est-ce qui vous a convaincu de vous représenter ? Quand est arrivée la défaite aux élections provinciales l’année passée, j’ai trouvé ça dur parce que je me privais d’une chose pour laquelle j’avais une passion incroyable. Je me demandais quasiment comment j’allais faire pour passer à autre chose! C’est un deuil que j’ai eu à faire. Je n’ai aucun problème à accepter le verdict, mais je me trouvais dans une situation où j’avais perdu la possibilité de faire ce que j’aime le plus au monde. À l’époque, j’avais dit que je ne ferais plus de politique. Beaucoup de gens m’avaient approché pour que je fasse de la politique municipale et ça ne m’intéressait pas. Pourquoi ? Le parlementarisme est l’aspect que j’aime le plus de la politique. J’aime parler des enjeux nationaux, de la force du Québec au sein du Canada. J’aime prendre la parole en Chambre, poser des questions, faire des interventions, aller en commission parlementaire, étudier les projets de loi et essayer de les améliorer. Quand j’ai eu mon investiture de 250 personnes et que j’ai vu cette énergie, j’ai compris pourquoi je m’étais ennuyé. J’ai compris ce qui me manquait. Les gens trouvent que j’interviens de façon éloquente. Les gens sentent que je vais les défendre. Je déteste les injustices. D’où vous vient ce trait de caractère ? Je ne sais pas. Quand j’ai été absent pendant un an, je me suis rendu compte que les injustices me révoltaient. Ça me met hors de moi. D’où ça vient? Je l’ignore. Quand je n’étais plus député, des gens venaient me voir quand même et j’essayais de les aider. Je ne crois pas que c’était inné en moi, mais mon métier a fait en sorte que j’ai développé ça. C’est grâce à mon équipe qu’on est capable de régler des situations. Quand j’étudiais des lois à l’Assemblée nationale, je me disais que ça allait plus loin que ça. Il y a des êtres humains qui sont affligés par ces décisions. J’ai parfois l’impression qu’il y a des sujets qui sont discutés en chambre comme si on parlait de meubles, alors qu’il est question d’humains. C’est la même chose pour le Québec qui est victime d’injustice au sein de la fédération canadienne. Ça se rajoute à ma mission qui est que tous les Québécois se fassent respecter. Comment votre ferveur souverainiste s’est-elle développée ? Ç’a commencé le 15 novembre 1976. Quand j’ai vu ma famille réagir à l’élection de René Lévesque. J’ai vu cette réaction de joie indescriptible. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose qui se passait avec ce sujet-là qui faisait en sorte que les gens que j’aime étaient heureux. Ma mère l’appelait Ti-Poil comme s’il faisait partie de la famille. La politique, c’est très important. Pendant la dernière année, j’ai enseigné et quand je parlais de politique à mes étudiants, je voyais qu’ils n’avaient pas d’intérêt. Je leur disais que ça change des vies. Je travaillais sur des projets de loi et je voyais déjà les conséquences que ça aurait sur la vie des gens. J’ai toujours été un souverainiste. Dans ma tête, mon pays est déjà fait. Chaque fois que je parle de mon pays, je parle du Québec, c’est systématique. J’ai réglé ce problème-là depuis longtemps. Jamais je ne me présenterai pour un parti fédéraliste. J’aime mieux mourir seul chez moi comme un chien que de renier ce que je suis! Vous avez travaillé avec Yves-François Blanchet du temps que vous étiez tous les deux au Parti québécois… Oui, il était ministre de l’Environnement et j’étais député. J’étais sur la commission parlementaire à propos de l’inversion du pipeline Enbridge. Je le trouvais bon avant, mais là je l’ai trouvé extraordinaire pendant la campagne. Il a fait une campagne débile, au-delà de mes attentes. On lui doit à peu près tout. S’il n’avait pas été là, je ne serais pas là aujourd’hui. Quand je regardais le débat, je savais que ma job se jouait là. J’ai dit à mes étudiants que mon avenir allait se jouer là. Est-ce que l’enseignement va vous manquer ? J’ai enseigné intensivement pendant 20 ans, puis 5 ans occasionnellement quand j’étais député. Je ne sais pas. Quand t’as goûté à la politique, c’est difficile de ne pas vouloir y retourner… C’est quand même deux emplois qui se ressemblent beaucoup… Absolument. Ce sont deux jobs de communication. La seule différence, c’est que quand tu es enseignant, tout ce que tu dis est vrai. Personne ne te contredit. Quand tu es politicien, tout ce que tu dis est faux aux yeux des gens. On doit se battre contre cette perception. On veut tous faire le clip qui sera diffusé à la télé. Le message passe mieux et c’est ce qu’on retient. Vous l’avez dit, la politique est une histoire de famille chez vous. Avez-vous aussi vécu votre élection en famille cette année ? Ma blonde est souverainiste comme moi. Si elle n’avait pas voulu que je revienne, je n’aurais pas pu le faire parce que j’ai deux jeunes enfants. Elle s’est rendu compte en fin de campagne que j’allais gagner. C’est la première fois que mes enfants étaient stressés face au résultat de l’élection. Ma fille de 7 ans m’a dit qu’elle voulait que je gagne, même si j’allais être moins à la maison, parce qu’elle aime me voir à la télé! Ils me disent qu’ils ont hâte de voir le château d’Ottawa!