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La pandémie touche plus durement les femmes

le lundi 08 mars 2021
Modifié à 10 h 27 min le 04 mars 2021
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

La COVID-19 touche plus durement les femmes partout sur la planète, selon l’Organisation des nations unies (ONU). La région n’échappe pas au phénomène. « La COVID-19 creuse des inégalités déjà existantes dont souffrent les femmes et les filles dans tous les domaines, de la santé à l’économie, en passant par la sécurité et la protection sociale », observe l’ONU sur son site internet. Les femmes sont majoritaires au front pour prendre soin des malades et combattre le coronavirus, rappelle l’organisation. Avec les écoles fermées et les enfants à la maison, leur charge de travail augmente aussi, indique l’ONU, de même que la charge mentale. Leurs emplois et revenus sont aussi davantage affectés. « Près de 60 % des femmes travaillent dans le secteur informel, ce qui les rend plus susceptibles de sombrer dans la pauvreté », fait-elle part. Plusieurs organismes communautaires joints par Le Soleil de Châteauguay à l’approche du 8 mars ont confirmé les constats de l’ONU à l’échelle locale. [caption id="attachment_100396" align="alignleft" width="170"] Gabrielle Juneau (Photo gracieuseté)[/caption] « En effet, l’impact de la pandémie frappe plus durement les femmes même dans notre région », affirme Gabrielle Juneau, directrice générale du Quartier des femmes à Châteauguay, un organisme voué à l’amélioration des conditions de vie des femmes. « Nous avons pu constater que les femmes ont été plus nombreuses à perdre leur emploi dans les domaines tel que l’hébergement, la restauration et le commerce de détail dans la région de Châteauguay », témoigne Mme Juneau. « Aussi, souligne-t-elle, les femmes sont plus à risque d’être atteintes de la COVID-19 dû à leur présence plus importante dans le domaine de la santé, de l’éducation et des soins personnels. En effet, la majorité des enseignant(e)s sont de sexe féminin. La plupart des employé(e)s du réseau de la santé sont de sexe féminin. Les emplois dans le domaine des soins personnels sont, aussi, principalement occupés par des femmes. » En effet, les femmes représentaient 57 % des cas de COVID-19 au pays au début du mois de juin 2020 et 54 % des décès, rapporte le Journal d’obstétrique et de gynécologie du Canada, citant des données de l’Agence de santé publique du Canada dans le cadre d’un article intitulé « Enjeux de condition féminine en temps de pandémie : Iniquité des sexes ».  Conciliation travail-famille Le télétravail et l’école à distance ont alourdi la tâche de bien des femmes. « Le confinement a aussi demandé, encore une fois, aux femmes de conjuguer avec les nombreuses responsabilités professionnelles et familiales dues à la conciliation de la scolarisation à la maison des enfants, pour les mères monoparentales. Le travail invisible, tel que la gestion de l’horaire familial, les tâches domestiques, le soutien aux proches, n’a fait qu’augmenter en pandémie et en confinement pour les femmes », exprime Gabrielle Juneau. Parmi les enjeux du télétravail en temps de pandémie, le Conseil du statut de la femme expose dans un article paru en mai 2020 : « Manque d’espace ou d’équipement informatique, interruptions constantes pour répondre aux besoins de la progéniture, accompagnement dans les travaux scolaires entre deux réunions, augmentation des tâches domestiques, soutien émotif à toute la famille, autant de conditions qui ont pu contribuer à faire croître la charge mentale des mères. » [caption id="attachment_100398" align="alignleft" width="170"] Vanessa Richer[/caption] « C’est vraiment un paradoxe. Les femmes sont touchées dans les deux sens. Elles sont plus en contact avec la COVID en donnant des soins et elles perdent leurs emplois dans les services. Leur charge mentale et le travail invisible augmentent », déplore Vanessa Richer, intervenante communautaire chez D’Main de femmes à Salaberry-de-Valleyfield. « Quand les écoles ferment, qui reste à la maison ? Dans un couple, qui doit quitter son emploi ou faire moins d’heures pour s’occuper des enfants ? C’est la femme », dit Mme Richer. Violence conjugale Gabrielle Juneau fait aussi état d’une augmentation de la violence conjugale et de la violence envers les femmes. Directrice générale de La Re-Source, maison d’aide et d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale basée à Châteauguay. Karine Morel témoigne : « Oui, effectivement nous constatons des impacts de la pandémie sur les femmes utilisant nos services et sur toutes les femmes en général. Ces répercussions ponctuelles liées à la pandémie ne sont que les symptômes des inégalités encore présentes entre les hommes et les femmes. Les violences faites aux femmes sont exacerbées en contexte de pandémie; nous constatons une augmentation de la gravité des violences subies. Les cinq homicides conjugaux du dernier mois en sont la preuve flagrante et malheureuse. » Santé mentale « Ce sont les femmes qui maintiennent le tissu social et familial en place au détriment de la santé physique et mentale », observe Gabrielle Juneau. Le Conseil du statut de la femme du Québec en fait état dans une publication le 28 mai 2020. « Selon une étude de l’Observatoire de la consommation responsable menée à la fin avril, les femmes sont plus anxieuses que les hommes durant la pandémie, comme le démontre l’indice d’anxiété de 50 % chez les femmes contre 43 % chez les hommes », y lit-on. Relance « féministe » Comme le signale l’ONU et diverses organisations, Mme Juneau observe : « La crise sanitaire n’a fait que mettre en lumière des inégalités présentes tout en les augmentant de façon significative ». Elle prône une relance économique « féministe », une demande commune des groupes membres de l’R des centres de femmes du Québec. Ce qui doit entre autres comprendre, selon le regroupement, d’investir massivement dans le logement social, de hausser immédiatement le salaire minimum à 15 $ l’heure, mettre en place un revenu minimum garanti et de « reconnaître pleinement la valeur du travail des femmes, notamment les femmes que la société racise, ce ne sont pas des anges, mais des travailleuses avec des compétences ».