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Le milieu agricole prend la santé psychologique des siens en main

le mercredi 06 juillet 2016
Modifié à 0 h 00 min le 06 juillet 2016
Par Joëlle Bergeron

joelle_bergeron@gravitemedia.com

Il faut mieux détecter les signaux de détresse des agriculteurs et les informer davantage sur les ressources d’aide existantes; tels sont les constats auxquels sont arrivés les participants du premier forum visant l’amélioration de la santé psychologique en agriculture.

Pour réaliser ces objectifs, l’Union des producteurs agricoles (UPA) en collaboration avec l’Association québécoise de prévention du suicide a mis sur pied la formation sentinelle.

«Les représentants en alimentation, les vétérinaires ou les comptables qui se rendent fréquemment sur les fermes sont souvent les premiers à remarquer des changements chez les agriculteurs, indique Jaclin Bisaillon, président du syndicat de l’UPA du Haut-Richelieu. L’agriculteur va se confier à cette personne-là de façon directe ou indirecte parce qu’il a une relation de confiance avec elle, mais ça s’arrête là.»

Pour mieux outiller ces gens de première ligne, l’UPA Montérégie – de même que toutes les branches régionales –, s’est donnée deux ans pour déployer la formation sentinelle.

Des rencontres sont aussi prévues au cours des prochaines semaines avec les intervenants sociaux et médicaux de la région pour leur faire connaître la réalité des producteurs agricoles.

Réticences

Le directeur général de l’organisme Au cœur des familles agricoles (ACFA), René Beauregard, voit ce dialogue d’un bon œil, puisqu’il remarque que les agriculteurs sont «réticents» à se tourner vers les ressources existantes.

«Un producteur qui est dans le besoin ne veut pas nécessairement que ce soit su, dit-il. Ses proches le savent, mais ce n’est pas connu du milieu. Notre maison de répit (à Saint-Hyacinthe) obtient d’ailleurs beaucoup de succès parce que la personne peut venir consulter dans l’anonymat.»

Recréer un réseau

Élevé dans le milieu agricole et propriétaire d’une ferme à Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix, Jaclin Bisaillon constate que les producteurs doivent se tourner vers les ressources parce que le tissu social s’effrite.

«Quand la ferme de mes parents a brûlé, il y avait près de 10 fermes au kilomètre et tout le monde s’était porté volontaire pour les aider à reprendre le dessus, raconte-t-il. Le clergé était également très présent et aidait beaucoup à l’époque. Maintenant, il y a une ferme au kilomètre et c’est devenu difficile d’entretenir un réseau entre producteurs; d’où l’utilité de bâtir des ponts avec de nouvelles ressources (CLSC, travailleurs de rang) pour obtenir de l’aide.»    

 

Niveau élevé de détresse

Près d’un producteur agricole sur deux souffre d’un niveau élevé de détresse psychologique au Québec, selon les travaux de la chercheuse Ginette Lafleur qui a sondé près de 1500 producteurs de lait, porc et volailles en 2006.

«Ceux dans la production laitière sont ceux qui sont le plus challengés présentement, surtout avec le dossier du lait diafiltré, indique René Beauregard, directeur général de l’organisme au cœur des familles agricoles (ACFA). Pour eux, les inquiétudes sont au niveau monétaire, mais règle générale, les problèmes proviennent aussi de l’absence de relève, des conflits entre les générations, de l’imprévisibilité de la météo, de la maladie des animaux, de la charge élevée de travail etc.»

 

Quelques statistiques récoltées par l’organisme Au cœur des familles agricoles

29 % des clients vivent des situations de détresse familiales/conjugales;

28 % des conflits vécus par les producteurs sont en lien avec la relève agricole;

54 % demandent l'aide eux-mêmes.

La clientèle est composée de 53% de femme et de 47% d'homme.

Qui joindre en cas de détresse?

Centre de prévention du suicide: 1-866-APPELLE (277-3553)

Au cœur des familles agricoles – ressource en santé psychologique et maison de répit: 450 768-6995.

CLSC (travailleur social): www.santemonteregie.qc.ca  

Ressources privées – Ordre des psychologies du Québec: 1-800-561-1223