Opinion

Le privé complémentaire, un allié méconnu du réseau public de la santé

le mercredi 22 février 2017
Modifié à 0 h 00 min le 22 février 2017

Au Québec, le réseau de la santé et des services sociaux est à la croisée des chemins. Il est au cœur de plusieurs attentes légitimes et parfois contradictoires. La population souhaite plus d’accessibilité et de qualité. Le gouvernement exige plus de productivité, sans compromis sur la qualité. Les professionnels et les travailleurs attendent une rémunération équitable et un milieu de travail positif. Dans ce contexte complexe et parfois tendu, il nous importe de mieux faire connaître l’idée du «privé complémentaire», un allié trop souvent méconnu du réseau public de la santé et des services sociaux.

Il existe au Québec, une volonté diffuse que la santé et les services sociaux demeurent, le plus possible, dans le giron des services publics. Pourtant, nous savons tous déjà que le secteur privé est très présent dans notre réseau, ne serait-ce que par les professionnels autonomes, comme les médecins et les pharmaciens, et les nombreux fournisseurs qui offrent divers produits, services ou médicaments. Ceci invalide la conception selon laquelle les secteurs public et privé seraient opposés l’un à l’autre. En réalité, l’important est que la gouverne de notre réseau demeure strictement publique et que les acteurs privés soient sollicités, de façon complémentaire, afin d’optimiser les services rendus à la population.

D’ailleurs, au-delà des choses que l’on sait depuis longtemps, le «privé complémentaire» est déjà beaucoup plus présent qu’on ne le croit dans le réseau. Cela est vrai, autant dans le domaine des soins à domicile qu’au sein même des établissements, et cela, tout en respectant la primauté du secteur public. À titre d’exemple, notre clinique fournit depuis 1998 des services professionnels à domicile et en entreprise principalement dans le grand Montréal, incluant maintenant la réadaptation physique, l’ergonomie, la nutrition, les services sociaux, le suivi de grossesse, la psychologie, et bien d’autres spécialités. En tout, ce sont une dizaine de disciplines qui se déplacent dans l’environnement professionnel et domiciliaire de nos concitoyens, en collaboration avec nos collègues du réseau public.

Dans le domaine des soins à domicile, de plus en plus de personnes reçoivent les soins à la maison ou en entreprise. Elles le font de leur propre initiative ou sur référence d’un autre professionnel. Au sein des établissements, le personnel externe vient combler des besoins temporaires ou pallier à certaines surcharges afin de permettre la prestation des services requis dans le strict respect de toutes les normes applicables. De nombreux organismes publics et privés ont recours depuis des décennies à l’une ou l’autre de ces alternatives ponctuelles.

Le «privé complémentaire» complète la réponse aux besoins de soins et de services des Québécoises et des Québécois, sans que cela ne réduise la place du secteur public au sein du réseau. Il offre une flexibilité supplémentaire au réseau, améliore l’accessibilité aux soins et services, sans rien enlever à personne. De plus, considérant le vieillissement de la population ainsi que les impératifs d’efficience, cette formule facilitera des virages importants vers les soins à domicile et le financement axé sur le patient. Dans cette perspective, plutôt que de considérer le «privé complémentaire» comme une menace, il faut donc le voir comme un outil.

Assurer la permanence des services par un réseau public solide d’une part et, d’autre part, assurer l’optimisation des soins et des services par le recours ponctuel au «privé complémentaire», cela est, nous le croyons, la recette qui favorisera la pérennité du réseau québécois de la santé et des services sociaux.

Francis Desjardins,

président-fondateur de Clinique GO