Opinion

Lettre ouverte : mille mots ne valent pas toujours une bonne photo

le jeudi 16 août 2018
Modifié à 16 h 40 min le 16 août 2018
Pour plusieurs, le 19 août sera une journée comme les autres. Or, ce jour-là, plus de 20 millions de photos de toutes sortes seront prises dans le monde. C’est la Journée mondiale de la photographie. Dans l’histoire de l’humanité, jamais autant de clichés n’ont été pris qu’au cours des dix dernières années. Pourtant, l’héritage photographique d’aujourd’hui sera réduit à néant dans moins d’un siècle. Tous les gens que je rencontre se prétendent photographes. En vous procurant un appareil photo haut de gamme, vous pourrez même vous approprier le titre de «photographe professionnel» et vous promouvoir sur les réseaux sociaux. Or, être photographe, c’est beaucoup plus que de posséder la technologie; c’est d’avoir une certaine vision du monde et de la communiquer à travers l’image. C’est de jouer avec la lumière, les couleurs, les contrastes et les ombres pour mettre en valeur son sujet, raconter une histoire. Pendant ce temps, plusieurs villes et organismes organisent des concours bidons pour remplir leur banque d’images gratuitement au lieu d’engager un photographe. La qualité a un prix. Le travail d’un véritable photographe a une valeur. [caption id="attachment_46703" align="alignright" width="393"] Denis Germain, photographe.[/caption] C’est pour cela que mes photos ne sont pas gratuites et libres de droits, même si elles se trouvent sur Internet. Un crédit photo ne paie pas mon hypothèque. Je suis photographe de presse. Depuis quelques années, je suis témoin de l’érosion des revenus publicitaires dans l’industrie des journaux, alors que de plus en plus d’entreprises investissent dans Facebook, Google et compagnie. Les villes retirent leurs avis publics des médias imprimés. Résultat, certains se privent d’un photographe. Les journalistes doivent maintenant fournir des images en plus de leur texte, ou utilisent les photos officielles fournies par les organisations qui veulent se promouvoir. Je vais faire de la photographie pour gagner ma vie encore pour un temps, car au rythme où vont les choses, j’assisterai peut-être à la dernière remise des prix Antoine-Desilets lors du prochain gala de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, en mai prochain. Que sais-je? Denis Germain Photographe pour les hebdos Le Courrier du Sud, Le Brossard Éclair et Le Reflet