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Thérèse Robitaille: Une vie consacrée à l’enseignement

le mardi 20 mars 2018
Modifié à 15 h 51 min le 20 mars 2018
Par Hélène Gingras

hgingras@gravitemedia.com

Thérèse Robitaille-Lefebvre a secrètement voulu devenir médecin ou infirmière, mais le destin en a décidé autrement. Heureusement, car des centaines d’élèves auraient été privés d’une enseignante plus que dévouée. Portrait d’une dame de 90 ans qui a voué sa vie à l’enseignement. Mme Robitaille a fait ses débuts dans son village natal à l’école du rang 10 à Sainte-Agathe-de-Lotbinière, en septembre 1947. Elle avait 19 ans. «Comme Émilie Bordeleau dans Les filles de Caleb, j’enseignais sept niveaux et il n’y avait pas de toilette, pas de chauffage ni électricité dans l’école, raconte-t-elle. Seulement un poêle pour chauffer la classe. Je devais me lever la nuit pour mettre une bûche afin de garder la chaleur.» Une fois les élèves repartis à la fin du jour, Mme Robitaille ne regagnait pas la maison familiale parce qu’elle était située trop loin. «J’avais une petite radio, je tricotais et je brodais», poursuit la résidente de Candiac qui dormait sur place. Fille unique, la solitude ne lui pesait pas. Pas plus qu’elle n’avait peur même si elle était isolée. Toute menue encore aujourd’hui, Mme Robitaille est une force tranquille de la nature. Elle n’a jamais eu besoin de crier pour faire régner la discipline en classe. Puis, sa fermeté lui permettait de venir à bout des plus délinquants. Visite au ministre de l’Éducation La jeune Thérèse Robitaille avait aussi du cran. Après quatre ans d’enseignement à son école de rang, la détentrice d’un diplôme d’études supérieures en enseignement doublé d’un autre en musique a voulu améliorer son sort. «Les petites maitresses d’école comme moi gagnaient 600$ par année alors que j’ai des amies qui gagnaient le double», se souvient-elle précisément. À l’été 1951, elle sautait dans un autobus pour se rendre à Québec afin de rencontrer le ministre de l’Éducation de l’époque. «Il avait une immense carte de la province de Québec dans son bureau et les écoles où il manquait une enseignante portait un drapeau. Il m’a alors offert une école à Aylmer ou à Saint-Constant», rapporte-t-elle. Mme Robitaille a opté pour ce second choix, ce qui allait jalonner la suite de sa vie. Cependant, la visite de l’école de rang située sur la rue Sainte-Catherine à Saint-Constant n’allait pas l’impressionner. «Ce n’était pas propice à l’enseignement ni à l’apprentissage. Il y avait de l’encre sur les murs, des vitres cassées et des planchers sales», rapporte celle qui ne s’est pas gênée pour réclamer un grand ménage. Enseigner et apprendre Un mariage et la naissance de six enfants n’ont jamais pu l’éloigner de l’enseignement même s’il était rare à l’époque qu’une femme mariée travaille. «Ils venaient me chercher pour que j’enseigne parce qu’ils disaient qu’ils étaient mal pris», répétera-t-elle à quelques reprises au cours de l’entrevue. Pendant un an, en 1978, elle a aussi fait la classe dans une école française à Avalon, à l’occasion d’un échange France-Québec. «C’était complètement différent d’ici. J’enseignais l’équivalent du secondaire 3. J’avais le temps d’étudier le soir la matière que j’allais enseigner le lendemain», raconte la dame dont la curiosité intellectuelle est sans borne. À ce sujet, celle qui a trouvé le temps de décrocher un baccalauréat en sciences, tout en travaillant et élevant ses enfants, dira qu’elle a «toujours voulu être à la hauteur de ses élèves». Retraitée vraiment ? Mme Robitaille a officiellement pris sa retraite en 1984 à l’âge de 55 ans après avoir enseigné aux élèves du primaire et du secondaire ainsi qu’aux adultes. Elle a présidé pendant deux ans l’Association des retraités et retraitées de l'éducation du Québec au début des années 1990. Elle est d’ailleurs à l’origine du journal de cette association. Mme Robitaille est aussi des membres fondateurs de l’Université du troisième âge à Candiac. Elle est la seule participante toujours active à ces deux associations. Quand on dit une vie vouée à l’enseignement, difficile de faire plus! [caption id="attachment_39153" align="alignnone" width="521"] Les premiers élèves de Mme Robitaille à l’école de rang à Sainte-Agathe-de-Lotbinière en 1947.[/caption]