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Un zoothérapeute mordu de son travail

le mercredi 06 février 2019
Modifié à 8 h 04 min le 06 février 2019
Par David Penven

dpenven@gravitemedia.com

Pendant que Cannelle dévore avec appétit sa gâterie en forme d’os, Bémol, couché sur le divan, écoute sagement son maître, le zoothérapeute Sylvain Gonthier. Le bichon poodle, avec ses poils s’apparentant à du lainage, se laisse caresser comme une peluche. Seule sa tête bouge de temps à autre à l’écoute de son nom. «J’ai débuté en zoothérapie en compagnie de Bémol. Je l’ai recueilli alors qu’il avait deux mois. Bémol a eu un début de vie difficile. Il est issu d’une usine à chiens démantelée en 2013. Lorsque je l’ai adopté auprès de la SPCA de Montréal, j’ai dû m’engager légalement auprès d’eux, à suivre des cours de dressage», raconte le résidant de La Prairie. C’est d’ailleurs ce qui a poussé M. Gonthier à se consacrer à la zoothérapie.  
«Bémol et Cannelle font toute la différence dans la vie de quelqu’un. Ça m’énergise de vivre ce moment particulier qui nous amène vers les autres.» - Sylvain Gonthier, zoothérapeute
  «En suivant une formation à la Belle vie de chien [une école d’obéissance pour chiens à La Prairie], l’éducatrice me disait que j’avais un bon animal. Bémol était toujours premier de classe», poursuit ce dernier. M. Gonthier œuvre depuis de nombreuses années en tant qu’éducateur spécialisé. Le fait de devenir zoothérapeute représente une corde de plus à son arc. Il interagit auprès d’une clientèle variée de tous âges, et ce, dans divers organismes et institutions publiques et privées. C’est à la maison Le phare enfants et familles, un établissement de soins palliatifs pour enfants situé à Montréal, que Sylvain Gonthier a débuté il y a deux ans. Au début, seul Bémol l’accompagnait. Maintenant, Cannelle, un goldendoodle, fait partie de l’équipe.   Une relation d’aide à trois Le zoothérapeute ne guérit pas et ne pose pas de diagnostic. Il intervient à l’aide d’un plan d’intervention spécifique pour chacun de ses clients, affirme Sylvain Gonthier. Ce plan est conçu la plupart du temps à la suite de discussions avec le personnel soignant (ex: infirmières, médecins, psychologues). «On est là pour accompagner la personne qui a un problème ou encore simplement pour l’amener à avoir un bon moment de vie. Le zoothérapeute touche autant aux problèmes cognitifs, relationnels, émotionnels que physiques», précise ce dernier. M. Gonthier parle de «triangulation» lors de ses interventions. «En zoothérapie il y a le zoothérapeute, son animal et le client. Au lieu d’utiliser une approche directe avec le bénéficiaire, on passe par un troisième lien qui est le chien ou tout autre animal», explique-t-il. Par le biais de son animal, le zoothérapeute amène le client à poser les actions ou réactions qu’on attend de lui. «Par exemple, je devais travailler la motricité fine des mains chez un enfant en fauteuil roulant. J’ai déposé Bémol sur sa tablette et je lui ai dit qu’on allait chercher ensemble des puces sur le dos du chien en bougeant les doigts à travers son pelage. Tout se passe sous la forme de jeux. Il n’y a rien d’improvisé, chaque intervention répond à un besoin précis», explique le zoothérapeute.   Accompagnement L’animal peut être actif ou passif, selon ce qu’on attend de lui, mais sa seule présence en compagnie du zoothérapeute fait toute la différence, d'après Sylvain Gonthier. «Au Phare, Bémol a accompagné des enfants en fin de vie couchés dans leur lit, dit M. Gonthier. Le chien ressent la mort. Son attitude va changer. Il sera plus calme et va me regarder souvent. En tant que zoothérapeute, je dois porter une attention à mon animal.» Cette surveillance est nécessaire, car entre 15 et 30 minutes de travail auprès du bénéficiaire, l’animal a besoin de souffler. «On va faire un changement d’intervention qui permettra au chien de prendre une pause. J’ai un tapis que j’amène au travail et l’animal va se reposer. Je dois m’adapter pour qu’il soit bien», mentionne le zoothérapeute. «Parfois, Bémol [ou Cannelle] fait sa tête de cochon. Je n’annule pas la séance. Je dis au client que Bémol n’a pas le goût de travailler. Il s’ensuit une discussion avec le bénéficiaire sur les moyens qu’on pourrait prendre pour faire travailler le chien. Mon intervention prend juste une autre forme», déclare-t-il.   Corporation des zoothérapeutes du Québec «Ce n’est pas parce que tu te brosses bien les dents que tu es dentiste.» Cet exemple de Sylvain Gonthier est un rappel à la prudence aux personnes qui aimeraient avoir recours à la zoothérapie. Il invite les gens à la recherche d’un zoothérapeute à consulter le site de la Corporation des zoothérapeutes du Québec.