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Une famille du Pérou trouve son havre de paix en banlieue

le mercredi 27 janvier 2016
Modifié à 0 h 00 min le 27 janvier 2016
Par Joëlle Bergeron

joelle_bergeron@gravitemedia.com

Maria Romero, Péruvienne, est débarquée à Montréal avec son mari en 2003 à l’âge de 30 ans. En 2007, le couple et leurs deux enfants nés en sol québécois sont déménagés à Delson. Récit d’intégration d’une famille tombée en amour avec la banlieue.

LA SÉCURITÉ

«La sécurité qu’on cherchait, on l’a trouvée ici. À Delson, on peut laisser la porte ouverte de la maison, de la voiture; on a la tranquillité parce qu’on connaît les gens. Delson, c’est un petit endroit et c’est quelque chose qu’on aime beaucoup», affirme Mme Romero.  

Au moment où elle et son mari ont quitté le Pérou, il y avait beaucoup de délinquance et de criminalité, indique-t-elle. Les amoureux désiraient élever leurs futurs enfants dans un milieu plus sécuritaire et ont commencé à faire des démarches pour immigrer au Canada.

Après deux ans, ils ont pu obtenir le statut de résidents permanents et sont déménagés dans un appartement à Saint-Léonard.

«On a pu louer un appartement grâce aux parents de la femme de mon mari, dit-elle. Ils ont réservé un 3 1/2 dans l’édifice où ils habitaient.»

LA BANLIEUE

«La Rive-Sud, c’est plus facile pour l’intégration qu’à Montréal, estime Mme Romero. Il y a de plus en plus de cultures différentes: hispanophones, arabes, chinoises, etc. Il y a plus de ressources à Montréal, mais les gens sont plus durs d’approche et il y a moins le sentiment de communauté.»

Jadis interprète culturelle à la Maison internationale de la Rive-Sud à Brossard, Mme Romero ne tarit pas d’éloges à l’égard des organismes communautaires. Elle trouve qu’ils font un travail essentiel.

«C’est là qu’on va trouver l’information, les ressources, les amis… Il ne faut pas s’enfermer à la maison», recommande-t-elle.

LE TRAVAIL

Au Pérou, Maria Romero était avocate et son mari, Walter Durand, ingénieur industriel dans une boîte de télécommunications. S’ils sont aujourd’hui bien placés, ils avouent avoir galéré durant quelques années.

Tandis que Mme Romero était enceinte de son premier enfant, M. Durand a commencé à travailler dans un marché d’alimentation en même temps qu’il fréquentait l’université. Grâce à ce salaire minimum, le couple pouvait payer son loyer, mais fréquentait les banques alimentaires.

Cette situation a duré deux ans. M. Durand a ensuite obtenu un emploi dans son domaine, chez Telus.

«Là, on a pu commencer à respirer! Avant, c’était toujours des sacrifices, mais là, on pouvait se permettre une maison», confie la femme de 44 ans.

Le baccalauréat de Mme Romero est reconnu, mais elle n’appartient pas au Barreau. Après avoir accouché, elle est donc retournée à l’université en administration des services publics parce qu’elle voulait travailler pour le gouvernement.

«Quand j’ai eu fini, je suis tombée enceinte de mon deuxième. Lorsqu’il a eu six mois, j’ai réussi à avoir une place en garderie et j’ai eu la chance de commencer à travailler dans un organisme communautaire, au salaire minimum.»

Après son passage au communautaire, notamment au Club des Copains à Delson, elle a décroché un poste à la CSST, puis dans un autre organisme gouvernemental.

LE FRANÇAIS

Au Pérou, le couple parlait espagnol et anglais. Durant le processus d’immigration, M. Durand a suivi des cours à l’alliance française du Pérou durant six mois. Il parlait donc très bien la langue de Molière à son arrivée à Montréal. Mme Romero a plutôt appris le français au Québec.

«J’ai eu de la misère, raconte-t-elle. Je pleurais tous les soirs parce que je ne comprenais rien.»

«Aujourd’hui, j’ai encore un peu de misère, mais je peux m’exprimer sans problème. Ce sont les expressions qui me dépassent encore un peu», admet-elle en riant.

À la maison, la tribu parle espagnol; une façon de conserver ses racines.

«On est aussi allé souvent au Pérou avec les enfants et mon mari leur explique c’est quoi la culture, l’histoire, etc. Je fais aussi de la cuisine péruvienne», énumère Mme Romero.  

Au fil du temps, le clan a intégré des expressions québécoises qui n’ont pas d’équivalent en espagnol. Par exemple : «j’ai de la misère». La famille passe donc parfois de l’espagnol au français dans la même phrase.

L'HIVER

Débarqués en plein mois de janvier, les nouveaux mariés ont eu un choc brutal lorsqu’ils ont fait connaissance avec l’hiver.

«Je suis arrivée en espadrilles parce que je ne connaissais pas les bottes. Je portais aussi quatre vestes pour me protéger du froid», se remémore la Péruvienne.

Mme Romero a dû guérir sa première grosse grippe sans médicaments parce qu’elle était enceinte et qu’elle n’avait pas encore d’assurance maladie.

«C’était l’enfer! On est finalement allez magasiner pour des manteaux d’hiver et c’était cher! Pour nous, 100$, c’était toutes nos économies! On a dû faire beaucoup de sacrifices.»

L'INTÉGRATION

Mme Romero concède qu’il a été difficile pour elle et son mari de se rebâtir une vie au Québec.

«J’ai déjà pensé retourner au Pérou parce que je ne trouvais pas ma place ici, mais plus maintenant, confie-t-elle. J’avais même vérifié s’il y avait possibilité que je puisse ravoir mon emploi, puis je me suis rappelée pourquoi je suis venue.»

Après 13 ans, Maria ne pense plus à partir.

«J’habite ici, je travaille ici depuis longtemps, je fais ma part et je veux rester. Le sentiment d’appartenance, ça prend du temps à se développer.»

«Nous les latinos, on n’a pas de misère à se faire des amis. C’est bon, parce que ça remplace la famille qu’on n’a pas ici. On s’entraide.»