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Besoin urgent de pharmaciens en établissements de santé

le mercredi 24 février 2021
Modifié à 17 h 22 min le 23 février 2021
Par Yanick Michaud

ymichaud@gravitemedia.com

Il manque énormément de pharmaciens dans les établissements de santé en Montérégie. « Je suis surprise de ne pas avoir lu qu’il y a un besoin criant pour les pharmaciens. L’hôpital, c’est ouvert 365 jours par années. Et il y a toujours un pharmacien de garde », explique l’une d’elles. « Mais depuis la fusion des CISSS du ministre Barrette, nous devons desservir les centres d’accueil de la région, l’Hôpital Barrie-Memorial, les CHSLD », lance la pharmacienne qui ne tenait pas à voir son nom relaté dans les médias. Elle insiste cependant pour mentionner que la campagne de recrutement du CISSSMO doit permettre de trouver de la relève. Immédiatement.

Des besoins immédiats

Pour elle, la relève doit être prête en ce moment. « Je comprends que nous devions remplir le prochain hôpital de Vaudreuil-Soulanges en 2026. Mais j’aimerais qu’ils disent que c’est en ce moment que nous avons besoin de relève. Il y a des postes à combler de manière urgente. Ça va mal et plus ça va, plus ça s’aggrave », juge la dame Elle dit que les équipes des hôpitaux du Suroît et Anna-Laberge perdent constamment des joueurs. « En plus des congés de maternité qui accentuent la pression sur les équipes, nous devons travailler à tous les jours avec des pharmaciens « dépanneurs », à contrat, pour pouvoir assurer les services de base. Nous sommes à bout de souffle. Notre travail est méconnu des gens, mais tellement essentiel pour les patients. Nous sommes malheureusement trop souvent oubliés », insiste-t-elle.

Un doctorat et une spécialisation

D’autant que depuis quelques années, les choses ont changé dans le métier. Pour œuvrer dans un établissement de santé, il faut obtenir un doctorat. Et idéalement une spécialisation pour travailler en milieu hospitalier. À l’époque de son embauche la dame avait obtenu un bac et une maîtrise. « Le manque était tellement flagrant que déjà à l’époque j’avais été embauchée. Ça montre qu’il y a une pénurie qui dure depuis trop longtemps. Et à l’époque des fusions, certains ont préféré ne pas rester. Ça va mal et nos équipes sont en détresse. Il faut bouger dès maintenant », implore la dame. Manque de 18% Selon les résultats de la dernière enquête annuelle de l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (A.P.E.S.), la région enregistrait un taux de pénurie de pas moins de 18 %. L’A.P.E.S. réclame des actions rapides afin de résorber la situation et d’éviter des conséquences trop importantes sur les soins et services à la population. Au 1er avril 2020, 26 postes de pharmaciens en équivalent temps complet (ETC) étaient non comblés sur un total de 142 postes dans les établissements de santé de la Montérégie. Ces derniers ont d’ailleurs eu recours aux services de pharmaciens dépanneurs pendant 340 jours entre le 1er avril 2019 et le 31 mars 2020.

C’est ainsi partout au Québec

À l’échelle du Québec, un poste de pharmaciens d’établissements sur cinq (19 %) était non comblé. L’enquête annuelle 2020 a révélé 286 postes non comblés en ETC et 5503 jours de dépannage. Considérant la période couverte, les données ne permettent d’ailleurs pas d’évaluer les effets de la pandémie de COVID-19, qui a possiblement aggravé la situation. « Nous sommes arrivés à un point où la pénurie nuit à la couverture de soins pharmaceutiques offerte aux patients hospitalisés, ambulatoires et hébergés en CHSLD. Or, dans un contexte de vieillissement de la population et d’explosion des problèmes de santé aigus et chroniques, un établissement de santé doit pouvoir compter sur un nombre suffisant de pharmaciens. En tant qu’experts des médicaments, ceux-ci doivent faire partie plus systématiquement des équipes de soins, dans une logique d’interdisciplinarité », a déclaré le président de l’A.P.E.S., François Paradis.

Conséquences graves

Outre la découverture de secteurs importants, tels que l’urgence et les CHSLD, l’insuffisance de soins pharmaceutiques en établissement de santé a plusieurs conséquences négatives. On note l’augmentation des risques d’incidents et d’accidents médicamenteux. Il y a aussi l’allongement de la durée moyenne des hospitalisations, ainsi que des risques d’effets indésirables et d’interactions. Il est question également des retours à l’urgence et des réhospitalisations (syndrome des portes tournantes); d’une diminution de la qualité de vie des patients; ainsi que des coûts supplémentaires pour le système de santé.