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Carambolage sur l’A15 : de la grogne concernant le remorquage

le vendredi 28 février 2020
Modifié à 8 h 31 min le 02 mars 2020
Par Audrey Leduc-Brodeur

aleduc-brodeur@gravitemedia.com

La note a été salée pour un automobiliste impliqué dans le carambolage monstre sur l’autoroute 15 Sud à La Prairie, le 19 février. Selon la copie de sa facture de remorquage qu’a obtenue Le Reflet, le propriétaire d’un Jeep Liberty a dû débourser plus de 1 300$ pour récupérer son véhicule. De son côté, la compagnie se défend. Le Journal a joint le propriétaire du véhicule remorqué, mais ce dernier n’a pas voulu discuter de sa situation. Il s’est contenté de dire qu’il allait laisser le dossier à ses assureurs. Nous lui avons appris qu’une photo de sa facture circulait aussi sur les réseaux sociaux depuis le mardi 25 février. La publication a été retirée le lendemain. Ancien remorqueur, Sébastien Roy a transmis intentionnellement au Reflet la charte des normes de tarifs dans une zone exclusive. La tarification de base pour le remorquage d’un véhicule est fixée à 160$. Elle s’élève à 205$ pour récupérer son véhicule. Ayant déjà été de l’autre côté de la clôture, M. Roy ne cache pas qu’il est courant dans le milieu de hausser ces frais lorsqu’il n’y a pas d’entente d’exclusivité. Cependant, il estime que la compagnie est allée trop loin. «Ce n’est pas parce que c’est un carambolage que les opérations deviennent compliquées pour nous. Il n’y a jamais lieu d’avoir autant de temps d’attente», affirme-t-il. D’autres échos quant aux opérations de remorquage sont parvenus au Journal. Une dame a contacté Le Reflet deux jours après l’accident pour témoigner de ses difficultés à récupérer le véhicule de son fils. Elle a dû s’y prendre à plusieurs reprises afin d’obtenir la permission de la compagnie de remorquage pour reprendre possession de son véhicule, relate-t-elle. «J’ai appelé la Sûreté du Québec et on me disait toujours que c’était la compagnie qui devait me redonner ma voiture, mais cette dernière me répétait que je ne pouvais pas la récupérer. Je leur ai demandé si elle était plus forte que la police. C’est à ce moment que j’ai pu aller chercher le véhicule», raconte Monique Trudeau, qui a déboursé 528$. Réactions L’entreprise en question, Charette Service d’auto, a accepté sans réticences de donner sa version des faits. D’entrée de jeu, le propriétaire, Pierre Charette, a affirmé qu’il «n’y avait aucune cachette». Pour justifier les factures, il explique avoir dû débourser 10 000$ de sa poche en frais environnementaux, notamment. «C’est sûr que j’ai réparti ce montant entre les factures, dit-il. J’ai aussi assumé les frais pour remplir quatre conteneurs de pièces et de déchets.» En 39 ans d’expérience, il affirme n’avoir jamais vu un carambolage de cette ampleur. «Il a fallu d’abord tasser les véhicules pour permettre aux pompiers de se frayer un chemin et sortir les personnes prises, raconte-t-il. Les voitures étaient collées les unes contre les autres. Par la suite, les autorités ont cru qu’un camion-citerne coulait, alors qu’un camion contenant des réservoirs de propane se trouvait à proximité. Tout ça a retardé les opérations.» Trop ou pas assez de remorqueuses ? Le secteur de l’autoroute 15 où est survenu le carambolage n’est pas assujetti à une clause d’exclusivité. Ce n’est pas un secret dans le milieu que les compagnies de remorquage jouent du coude pour obtenir le contrôle des opérations, selon plusieurs témoignages. Le propriétaire d’une compagnie de remorquage, qui préfère garder l’anonymat, puisqu’il soumissionne pour des contrats dans la région, affirme avoir vu son aide refuser lorsqu’il s’est présenté sur la scène de l’accident. «Certains de mes clients étaient impliqués dans le carambolage et m’ont appelé parce qu’ils avaient besoin d’être remorqués. Je n’ai pas pu le faire, car on m’a dit que je n’avais pas le droit, explique-t-il Ç’a retardé le nettoyage, car on aurait pu donner un coup de main. J’aurais pu remorquer des véhicules qui se trouvaient à l’arrière, par exemple.» Son témoignage vient corroborer celui de la compagnie de remorquage SPX qui a raconté sur les ondes du 98,5 avoir aussi essuyé un refus des autorités sur place. Pierre Charette estime quant à lui que le chaos du moment ne favorisait pas la présence d’autres remorqueurs. «Le lendemain, des agents de la Sûreté du Québec sont venus au garage pour faire de l’expertise sur les véhicules accidentés. Si six ou sept compagnies avaient aussi remorqué des véhicules, ça aurait été difficile pour les policiers de faire leur travail. En tant que client, tu veux aussi savoir où se trouve ton véhicule», fait-il valoir. Par ailleurs, il précise avoir fait appel à deux autres compagnies de remorquage avec lesquelles il a collaboré. «Je sais que certaines compagnies sont frustrées et qu’il y a des facteurs pécuniers dans cette histoire. Je peux vous dire qu’au moins 90% des clients étaient contents. Un agent surveillait constamment les véhicules entreposés et tous les clients ont pu récupérer leurs effets», assure-t-il. Facture L’addition, qui s’élève à 1389,48$, se détaille ainsi: 345$ pour des frais de base, 208,50$ pour l’entreposage pendant six jours, 135$ pour de l’absorbant, 20$ en frais de dossier, 125$ en frais environnementaux et 375$ pour le nombre d’heures nécessaires à l’opération. À ce chapitre, le remorqueur indique avoir eu besoin de trois heures pour extirper le véhicule de la scène.