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COVID-19

Comment la COVID-19 a changé le rituel de l’épicerie

le jeudi 21 janvier 2021
Modifié à 8 h 50 min le 21 janvier 2021
Par Michel Thibault

mthibault@gravitemedia.com

Maintenus ouverts parce que tout le monde a besoin de manger pour vivre, les marchés d’alimentation offrent une expérience radicalement changée par la lutte à la COVID-19. Ils doivent appliquer une foule de mesures sanitaires dictées par le gouvernement. Et veiller à les faire respecter. Ce qui ne va pas sans heurts. Samedi matin, 9 janvier, une file s’est formée à l’entrée d’une épicerie de Châteauguay. Arrive le tour d’un couple âgé. Un employé l’informe qu’une seule personne par famille est autorisée à entrer. « Non, non, on va entrer ensemble », lance le mari. L’employé indique que la règle est la même pour tout le monde. D’accord. Le mari accepte que sa femme entre seule. Puis il reste sur place. Le commis lui répète la consigne. « Je veux entrer » insiste-t-il. Les gens derrière, dont l’auteur de ces lignes, aimeraient bien qu’il se conforme à la règle. Il finit par gagner. « Hé ! Moi vous ne m’avez pas laissé entrer ! » lance un homme au volant d’une voiture à proximité. À l’intérieur, une employée déplore devoir régulièrement composer avec des clients récalcitrants. Un autre fait part que certains couples se présentent à l’entrée séparément. Ils se rejoignent ensuite en abandonnant un panier dans le magasin. Que le personnel doit replacer.
File d’attente devant une épicerie au début de la pandémie. (Photo Michel Thibault)
La plupart des clients respectent les consignes, selon une personne à l’emploi d’un autre marché d’alimentation de la région. Mais il faut souvent les rappeler à l’ordre. Plusieurs portent le masque sous le nez ou ne respectent pas la distance de 2 mètres, soutient-elle. « Les pires sont les hommes âgés de 70 ans en montant. Eux ils ont la tête dure et sont de mauvaise humeur. Pas tous, mais une couple », fait-elle part. Elle doit composer avec un ou deux cas d’agressivité par jour. Tous les employés, dit-elle, « mangent des bêtises », un moment donné. Eux qui étaient considérés comme des héros au début de la pandémie parce qu’ils travaillent au front, avec un risque accru d’attraper le coronavirus. Elle confie qu’un moment donné une cliente a été très bête avec elle, exigeant qu’elle désinfecte un panier. « J’avais envie de lui dire d’aller au diable mais j’ai obéi. Puis je me suis tournée et j’ai pleuré de rage. Elle était très agressive. Le monde est écoeuré des consignes. Et c’est nous qui prenons les coups. Je suis tellement fatiguée quand je finis ma journée, vous ne pouvez pas savoir », déplore-t-elle. Mais elle insiste : « C’est seulement quelques clients. » Épicier pas policier Les personnes interviewées ont préféré garder l’anonymat par crainte de représailles. Le journal a sollicité une entrevue auprès de Sobeys et Metro. C’est le Conseil canadien du commerce de détail, qui représente 45 000 places d’affaires au pays, qui a répondu à la demande. Son porte-parole, Jean-François Belleau, a indiqué que les incidents avec des clients récalcitrants étaient un phénomène isolé. « C’est rare que ça dégénère en engueulade », a-t-il noté. Il a souligné que laisser entrer une personne par famille dans les commerces visait à offrir « le plus d’accès possible à tout le monde ». « Nous comprenons que ça peut être irritant mais c’est une question d’équité. On demande la collaboration de la population », a-t-il affirmé. Il a fait valoir que la situation était « un casse-tête pour tout le monde ». Et que les marchands n’imposaient pas les règles de gaieté de cœur. Il a laissé entendre que la nouvelle donne dictée par la pandémie va à l’encontre de la vocation de l’épicerie où, auparavant, les gens pouvaient échanger avec les employés, circuler à leur guise, jaser avec la voisine ou encore goûter à un nouveau produit. « On dit : profession épicier. Pas policier. La situation actuelle est un peu contre nature », évalue Jean-François Belleau. Comment les clients composent-ils avec les règles sanitaires implantées dans les épiceries pour freiner la propagation de la COVID-19 ? Voici quelques témoignages recueillis via Facebook.    

MAUD COUSIN

(Photo Denis Germain)
Les règles à l’épicerie sont bien normales par rapport à la situation. J’apprécie que les chariots soient désinfectés systématiquement, c’est une bonne habitude pour le futur (ce sont des bouillons de culture habituellement). Je n’ai pas vu de personnes irrespectueuses lorsque je fais mon épicerie. Il faut arriver à prendre son mal en patience… mais je trouve le temps long…    

NATHALIE RIENDEAU

Je suis les règles, je me désinfecte les mains et même je rajoute du désinfectant sur les poignées et les côtés du panier. Ma liste est déjà faite et je vais où j’ai besoin dans l’épicerie. J’achète des fruits et légumes congelés. Je porte mon masque. Ceci dit, j’essaye le plus souvent d’aller faire mes achats quand il n’y a pas foule. Je suis satisfaite du service. Il est logique de réduire ainsi les foules spécialement si vous avez des craintes. Maintenant, avec les heures réduites en raison du couvre-feu, vous pouvez utiliser le service de commande en ligne. Je recommande.    

ISABELLE SÉGUIN

J’ai changé ma façon de faire l’épicerie; j’y vais maintenant aux 2 semaines (pour mon bien mental) et je me mets de la musique dans mes écouteurs. Ça me permet de me concentrer et de garder ma zénitude contre ceux qui ne respectent pas les directions ainsi que les gens trop lents et/ou trop pressés.    

JULIE BOUCHARD

J’évite autant que possible. Trois fois sur quatre, je planifie mes repas à l’avance et je commande en ligne. Pareil pour la boucherie.    

DIANE LEVASSEUR

Je n’y vais qu’une fois semaine pour le nécessaire très tôt le matin et 45minutes avant la fermeture. Je trouve déplorable que certaines personnes ne tiennent pas compte des flèches de directions.  

CÉLINE MEUNIER

Ça va bien. Je tente d’y aller une fois semaine. Je limite les épiceries choisies, je vais au Métro qui est le plus près et parfois au IGA selon les spéciaux. Nous avons cessé de regarder Maxi. Une seule fois depuis mars dernier. Nous n’allons plus au Walmart non plus. On limite nos sorties.  

ANDRÉ BENSON

Un seul de la bulle familiale s’y rend une fois aux 10 jours en respectant les consignes établies. Par contre, je me rends compte que plusieurs ne respectent pas la distanciation et la direction indiquée dans les rangées. Trop de manipulations inutiles des items aussi par les consommateurs. Je vais toujours au même endroits pour les emplettes .  

TRISTAN LÉONARD

En reconfinement « 70+ à risque » suite à la croissance de la 2e (3e ?) vague, nous avons recommencé la commande par courriel. Excellent service. Mais il y a 1 mois, en présentiel, je trouvais qu’il y avait plus de monde donc moins de distanciation malgré le fait que presque tout le monde semblait s’en préoccuper. Avez-vous remarqué que notre « aura » de sécurité s’est grandement agrandie…?  

DENIS THERRIEN

Je vous dirais pour ma part, bien que résidant à Saint-Lambert, très facilement au final même si c’était plus agréable avant sans masque. Un peu plus touché avec la fermeture forcée à 19h30 mais pas le choix, on s’ajuste, sinon faire l’épicerie reste la même chose, on porte juste un masque et on désinfecte nos mains et le panier. Le panier c’est l’employé qui fait cela. Juste une visite depuis le couvre-feu.