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COVID-19

La pandémie, un obstacle de taille pour les femmes victimes de violence conjugale

le mardi 16 juin 2020
Modifié à 8 h 53 min le 12 juin 2020
Par Vicky Girard

vgirard@gravitemedia.com

Pour les femmes victimes de violence conjugale, la pandémie est devenue synonyme d’anxiété. Ce stress a culminé pendant le confinement parce qu’elles étaient prisonnières chez elles avec leur conjoint et coupées de liens extérieurs. Cet aspect inquiète des organismes qui leur viennent en aide. Nathalie Latreille, coordonnatrice du centre de femmes l’Éclaircie à Sainte-Catherine, l’a constaté rapidement. «Il y a avait beaucoup de détresse psychologique, même pour les bénévoles qui, tout à coup, se sentaient inutiles. Nous avons redoublé d’effort pour garder le contact avec les femmes auprès desquelles nous intervenions», explique-t-elle. Des appels étaient effectués et des rencontres virtuelles avaient lieu fréquemment, individuellement ou en groupe. Néanmoins, beaucoup de liens se sont perdus, affirme Mme Latreille. De son côté, la Re-Source, une maison d’aide et d’hébergement pour les femmes victimes de violence conjugale à Châteauguay, a fait face à plusieurs défis pour conserver les liens établis avant le confinement. «Il y avait des enjeux au niveau de la sécurité. On s’est adapté pour pouvoir les rejoindre virtuellement et avoir de nouveaux moyens de les contacter, comme les messages textes», explique Karine Morel, gestionnaire. Pour accueillir celles qui en avaient besoin, l’équipe a mis en place des mesures sanitaires, incluant le port du masque et des gants, ainsi que l’installation de plexiglas. «Tout le monde peut travailler et être hébergé en sécurité. Heureusement, nous n’avons eu aucun cas de COVID-19, malgré une crainte», précise Mme Morel. Elle laisse savoir que le nombre d’hébergements n’est pas en hausse par rapport à l’année dernière. La Re-Source est néanmoins à pleine capacité. Claudine Thibaudeau, porte-parole de l’organisme SOS violence conjugale, confie quant à elle que la pandémie a compliqué et contribué à l’escalade de la tension qui existait déjà au sein de couples. Elle ajoute que les intervenants ont entendu des témoignages difficiles, notamment ceux de femmes dont les conjoints «se servaient de la COVID pour les empêcher d’aller prendre des marches ou de sortir. Ils pouvaient dire, par exemple: Si tu sors, tu ne reviens pas parce que tu vas être contaminée», raconte Mme Thibodeau. Certaines profitaient toutefois de sorties rapides à la pharmacie ou à l’épicerie pour appeler l’organisme. Mme Thibodeau constate également qu’«une des grandes complications pour les femmes victimes de violence, c’était la restriction de se déplacer entre régions. Elles ne pouvaient plus aller se réfugier dans leur famille si elles ne demeuraient pas à proximité». Elle considère également que la pandémie a empêché des femmes qui préparaient leur départ depuis longtemps de passer à l’action. «C’est une longue démarche et ç’a stoppé le cheminement de plusieurs», déplore Mme Thibaudeau. Déconfinement Le retour à la normale graduel n’en est pas nécessairement un pour les femmes en détresse. «Avec l’anxiété qui a augmenté énormément, certaines ne veulent pas ou ne peuvent pas plus sortir. Le stress lié à la COVID se fait davantage sentir pour plusieurs, car elles sont dans un état psychologique fragile», témoigne Mme Latreille. Elle explique aussi que des femmes ont fait face à des troubles alimentaires et de la dépression. Chez SOS violence conjugale, on note que le télétravail et les impacts financiers sont «loin d’être terminés», ce qui signifie que ce sera encore angoissant pour beaucoup de femmes. SOS violence conjugale: 1 800 363.9010 (24/7), www.sosviolenceconjugale.ca Visibilité SOS violence conjugale a reçu du soutien financier de plusieurs instances et des dons,  sans pouvoir le chiffrer, pour être en mesure d’aider les femmes. «On a aussi eu de l’exposure comme jamais et ç’a probablement contribué à une plus grande conscientisation sociale», fait remarquer Claudine Thibaudeau. Elle note cependant que cette prise de conscience s’observait déjà depuis quelques années, en raison des nombreux crimes conjugaux, entre autres. Mme Thibaudeau souligne que le réseau TVA a organisé un téléthon pour la cause. Roxane Bruneau, originaire de Saint-Philippe, a aussi mis en vente la chanson Le secret au profit de l’organisme. Il s’agit d’une pièce qu’elle a écrite alors qu’elle avait 12 ans, qui traite de la violence conjugale vécue par sa mère à l’époque.