Piché-Dufrost exclue de Jacques-Leber : des parents en colère

La citoyenne Geneviève Parent, devant l’école primaire Piché-Dufrost. (Photo : Le Reflet – Tristan Ouimet)
L’école secondaire Jacques-Leber, à Saint-Constant, pourrait accueillir des élèves de première à cinquième secondaire dès 2026-2027 une fois le nouveau bâtiment construit. Ainsi, tous les élèves de Saint-Constant pourraient y faire leurs études, sauf ceux de l’école primaire Piché-Dufrost, selon une des options envisagées par le Centre de services scolaire des Grandes-Seigneuries. Des parents mécontents ont dénoncé l’intention du CSSDGS au Reflet.
Selon l’échéancier préliminaire, le méga projet de démolition et de reconstruction de l’école secondaire Jacques-Leber, qui représente un investissement de 219,2 M$, permettra d’accueillir 1 276 élèves, soit presque le double de sa capacité actuelle.
Mais d’après le Centre de services scolaire des Grandes-Seigneuries (CSSDGS), les bassins scolaires doivent être révisés, car «même avec la livraison de la nouvelle école secondaire Jacques-Leber en 2026-2027, les projections indiquent un manque d’environ 1 200 places» dans le secteur, explique Hélène Dumais, directrice adjointe des communications du Centre de services scolaire, par courriel.
«Il est vrai que l’un des scénarios concerne plus particulièrement les élèves fréquentant actuellement l’école primaire Piché-Dufrost, lesquels pourraient – si la modification à l’ordre d’enseignement de l’école Jacques-Leber est adoptée – ne pas être dirigés vers cette école à compter de l’année scolaire 2026-2027», ajoute-t-elle.
L’école primaire Piché-Dufrost, à Saint-Constant. (Photo : Le Reflet – Tristan Ouimet)
À défaut de pouvoir fréquenter l’école Jacques-Leber, les élèves de l’école primaire Piché-Dufrost seraient inscrits à l’école secondaire de la Magdeleine à La Prairie.
Ce changement découle d’un avis d’intention adopté par le conseil d’administration du CSSDGS le 8 avril pour modifier les parties du 2e cycle d’enseignement dispensé à l’école secondaire Jacques-Leber.
Une partie de l’école secondaire Jacques-Leber actuellement. (Photo : Le Reflet – Tristan Ouimet)
Pour l’année scolaire 2026-2027, le Centre de services scolaire doit réévaluer les zones géographiques des écoles secondaires du secteur ainsi que la répartition de certains services éducatifs.
Le CSSDGS fait valoir que divers scénarios de répartition des élèves sont étudiés et qu’ils tiennent compte de nombreux facteurs, notamment la capacité d’accueil des écoles, la répartition équitable de la clientèle sur le territoire, les distances de transport, les besoins liés aux cohortes d’élèves futures, ainsi que l’équilibre démographique à maintenir dans les écoles du CSSDGS.
S’inscrivant dans une vision dite «long terme», cette offre à Jacques-Leber permettrait, selon le centre de services scolaire, «de scolariser certains des élèves plus vulnérables de Saint-Constant près de leur lieu de résidence», estime Mme Dumais.
«De plus, l'un des scénarios proposés permettrait de faire diminuer le nombre d'élèves transportés de 83 % à 67 %, ce qui représente environ 300 élèves qui sont présentement transportés et qui deviendraient marcheurs vers l’école Jacques-Leber», renchérit-elle.
«Discrimination»
La citoyenne Nadine Inkel, en avant de la construction de la nouvelle école secondaire Jacques-Leber, à Saint-Constant. (Photo : Le Reflet – Tristan Ouimet)
Les parents d’élèves concernés par ce changement ne sont pas du même avis. Geneviève Parent et Nadine Inkel estiment que cette option est discriminatoire à l’endroit de leurs enfants.
Mme Parent a une fille qui étudie à l’école secondaire Jacques-Leber, mais également une autre fille qui termine bientôt son primaire à Piché-Dufrost.
«L’exclusion de Piché-Dufrost me touche vraiment parce que c’est notre école de quartier depuis longtemps, fait-elle savoir. Le sentiment d’exclusion, de rejet et de discrimination, c’est plate de vivre ça.»
Les élèves de Jacques-Leber qui seront en 4e secondaire l’an prochain et qui résident dans le secteur de l’école Piché-Dufrost devraient eux aussi poursuivre leurs études à la Magdeleine, selon le scénario.
Ayant elle aussi une fille qui fréquente déjà l’école secondaire Jacques-Leber, Mme Inkel croit même qu’il s’agit d’une forme de «bannissement».
«On a investi 219 M$ pour une nouvelle école pour Jacques-Leber et on me dit qu’on n’a pas assez de place pour ma fille pour qu’elle termine sa 4e et 5e secondaire, dit-elle. Les enfants qui sont dans le quartier de Piché-Dufrost n’iront pas à Sainte-Catherine, mais à La Prairie. Pourquoi ce ne sont pas tous les élèves de Saint-Constant qui auront le droit d’aller à Jacques-Leber?»
«Lors d’une rencontre le 22 avril, des parents ont demandé à savoir s’il y avait un moyen de laisser ces quelques élèves-là [issus de Piché-Dufrost] à Jacques-Leber pour qu’ils terminent leur secondaire, plutôt que les déplacer à la Magdelaine, indique pour sa part Hélène Dumais. C’est là qui pourrait y avoir une voie de passage. On va voir si c’est possible.»
Mme Dumais précise que «d’autres secteurs à proximité de Saint-Constant» pourraient également être «touchés par une redéfinition des bassins d’élèves».
Favoriser la marche
Mme Parent fait remarquer que les jeunes de Piché-Dufrost qui feront la transition vers le secondaire devraient plutôt marcher, au lieu de prendre un bus pour aller «à quatre villes plus loin» de leur milieu familial.
«L’argument qu’on nous sort, c’est que Piché-Dufrost, en termes de kilométrage sur papier, est la plus proche école à Saint-Constant de la Magdeleine à La Prairie, laisse-t-elle entendre. Mais avec des recherches GPS, il y a la 132, les feux de circulation, la bretelle de l’autoroute 15, ce qui fait que Piché-Dufrost n’est pas la plus proche en termes de durée de trajet.»
«Il y a d’autres écoles à Saint-Constant qui sont proches de l’autoroute 30 qui peuvent se rendre jusqu’à la Magdeleine, ajoute-t-elle. Un enfant de 16-17 ans, c’est plus outillé et ça peut s’adapter [au transport].»
Nadine Inkel partage l’opinion de Mme Parent, mais ajoute qu’il serait mieux de permettre à tous les enfants de Saint-Constant d’étudier à Jacques-Leber, pour éviter «qu’il y ait trop de bus sur la route» en direction de la Magdeleine et que cela retarde «les trajets».
Les deux mamans avancent que les enfants de Piché-Dufrost sont dans une «petite» école et qu’ils ont besoin d’encadrement; elles sont donc contre l’idée d’envoyer leurs adolescents dans une école comme la Magdeleine qui compte au minimum 2000 élèves.
Qu’en pense la Ville?
La Ville de Saint-Constant dit avoir «pris connaissance, avec étonnement et grande préoccupation», de l’intention exprimée par le Centre de services scolaire des Grandes-Seigneuries.
«Nous tenons à préciser que la direction de la Ville et le maire n’ont été informés de cette situation que par l’entremise d’une employée municipale, après que les parents aient reçu une communication officielle du CSSDGS, spécifie-t-elle. Aucun avis préalable n’a été transmis à la Ville, et ce, malgré la bonne collaboration habituelle entre les deux parties.»
Saint-Constant approuve certains arguments des parents, soit la proximité de Piché-Dufrost à Jacques-Leber ou encore de favoriser la marche aux jeunes.
«Pour la Ville de Saint-Constant, il est tout à fait légitime et logique que les élèves de Piché-Dufrost puissent être intégrés à ce projet d’agrandissement et de développement scolaire dont bénéficie notre collectivité», explique-t-elle.
Dans la semaine du 28 avril, la Municipalité a eu une rencontre avec le CSSDGS pour laisser entendre sa position dans ce dossier.
Compréhensive
Le Centre de services scolaire des Grandes-Seigneuries comprend que certains parents puissent «ressentir de l’inquiétude, notamment en ce qui concerne la distance entre le domicile et l’école secondaire de destination», explique Hélène Dumais.
Une consultation publique aura lieu le 14 mai à l’école secondaire de la Magdeleine et permettra aux citoyens de prendre la parole.
«Aucun changement ne prendra effet avant l’année scolaire 2026-2027, et seulement après l’analyse approfondie des commentaires reçus lors de la consultation», laisse entendre Hélène Dumais.
Plus de détails dans le lien suivant : cssdgs.gouv.qc.ca/consultation_publique
Des pétitions contre ce potentiel changement circulent d’ailleurs sur les réseaux sociaux.
La décision sera prise le 25 juin lors de la prochaine séance du conseil d'administration du CSSDGS.