Opinion

Pour nous, gagne ou perd avec Joe Biden ?

le mercredi 11 novembre 2020
Modifié à 13 h 59 min le 10 novembre 2020
Par Hélène Gingras

hgingras@gravitemedia.com

[caption id="attachment_64041" align="alignleft" width="213"] René Vézina[/caption] Aussi invraisemblable que ça puisse paraître, trois jours après les élections américaines, nous n’étions toujours pas en mesure de savoir qui allait être le président des États-Unis ou quel parti serait majoritaire au Sénat. Mais il était déjà possible de déterminer sans aucun doute qui seront les gagnants: les avocats! Ils sont des centaines, de part et d’autre, à s’activer pour faire valoir les intérêts de leurs clients. Les honoraires vont suivre… On ne court pas grand risque en suggérant que si le vote s’était déroulé au Québec, les démocrates, Joe Biden en tête, auraient été élus haut la main. Donald Trump n’est pas populaire par ici. Et pour cause: au-delà de sa personnalité abrasive, il n’a cessé de déclencher des conflits commerciaux qui ont notamment affecté de grands secteurs de l’économie canadienne, du bois d’œuvre à l’aluminium en passant par l’industrie laitière et le papier journal. Et sa gestion erratique de l’épidémie de coronavirus a compliqué les aller-retours entre les deux pays. Est-ce à dire qu’on peut se réjouir de l’élection de plus en plus probable de Joe Biden à la présidence américaine au moment d’écrire ces lignes? Attention! Émotivement, ici, beaucoup peuvent se sentir indisposés par Donald Trump et ses débordements. Mais il faut comprendre que, traditionnellement, les démocrates sont plus protectionnistes que les républicains. Leur réflexe a toujours été d’infliger des taxes sur les produits venus d’ailleurs pour protéger, théoriquement, les travailleurs américains. Oui, Donald Trump s’est fait le champion du protectionnisme pendant sa présidence. Mais ce faisant, il tranchait avec les positions habituelles du parti républicain. Et on peut comprendre que plusieurs de ses proches ont travaillé à modérer ses ardeurs. Est-ce que Joe Biden, qui peut nous apparaître plus sympathique, sera aussi plus sympathique au rétablissement de meilleures relations commerciales entre le Canada et les États-Unis? C’est loin d’être évident. En plus de ce contexte électoral hors de l’ordinaire, nous devons composer avec la pire épidémie qui nous ait frappé depuis un siècle. Toute la planète est affectée, et les États-Unis en particulier. Quelque 235 000 personnes y sont déjà mortes et ce sinistre bilan empire de jour en jour. Les Américains, comme d’autres populations, ont et auront alors le réflexe de se replier sur eux-mêmes, entre autres parce que le mal doit forcément venir d’ailleurs… à leurs yeux. Et leur économie risque de ralentir. Ce ne sont pas là les meilleurs arguments en faveur du libre-échange avec les autres pays, à commencer par le Canada. Joe Biden peut fort bien être moins belliqueux que son prédécesseur. En temps normal. Mais s’il accède à la présidence, il ne sera pas immunisé contre les réflexes protectionnistes parce que les pressions seront intenses. Et nos propres sentiments à son égard n’y changeront pas grand-chose.