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Sept questions au maire de La Prairie

le mardi 14 mars 2023
Modifié à 12 h 46 min le 14 mars 2023
Par Guillaume Gervais

ggervais@gravitemedia.com

Le maire Frédéric Galantai complètera la 2e année de son mandat en novembre. (Photo: Le Reflet – Denis Germain)

Alors que le moratoire sur toutes les nouvelles constructions a été imposé il y a un an, Le Reflet s’est entretenu avec le maire de La Prairie Frédéric Galantai afin qu’il partage sa vision.

Plusieurs citoyens déplorent l’augmentation moyenne de 9,84% du compte de taxes. Vous avez fait valoir que le moratoire a causé de «minces rentrées d’argent» pour la justifier. Avez-vous envisagé de le retirer pour remédier à cela ?

«Ce n’est pas de gaieté de cœur qu’on a imposé le moratoire. Nos ingénieurs internes et les firmes d’ingénierie externes nous disent que la Ville est 10 ans en retard sur la mise au niveau du réseau sanitaire. Ma job, c’est de regarder en avant et pas de me dire ‘’voyons comment ça se fait qu’on est rendus là’’. Il faut comprendre qu’on a deux problèmes à La Prairie. Le premier est que notre propre réseau d’égout possède des vulnérabilités. Il faut les identifier et ensuite les colmater. Juste ça en soi, c’est quand même un travail important. Le deuxième problème est l’usine d’assainissement que nous partageons avec quatre autres villes. La Prairie a dépassé son quota depuis des années. C’est pour ça qu’on a dû mettre en place un moratoire.

On ne peut pas laisser le projet de La Prairie-sur-le-Golf tel quel. Les études disent que si on laisse aller ce projet-là, nos eaux usées vont se déverser dans le fleuve Saint-Laurent. C’est quelque chose qu’on ne peut pas se permettre. On serait à risque de recevoir des amendes salées du ministère de l’Environnement. Notre service du génie travaille pour identifier les vulnérabilités et les corriger. Ce processus-là devrait nous permettre, si tout va bien, d’assouplir le moratoire. Le moratoire ne va pas être levé lundi matin à 9h. Le but est de l’assouplir, de gagner un peu de débit au fur et à mesure qu’on corrige les vulnérabilités. En parallèle, ce sera de travailler avec la Régie d'assainissement des eaux du bassin de Laprairie (RAEBL) pour soit agrandir l’usine actuelle ou en construire une nouvelle. C’est le sujet de l’heure à la RAEBL.»

Avez-vous un échéancier pour lever le moratoire?

«On veut gérer les attentes. On ne veut pas faire de promesses. On le sait très bien qu’on a des infiltrations d’eau parasitaire, que ce soit de la rivière Saint-Jacques ou du fleuve Saint-Laurent. Il y a du travail qui aurait dû être fait dans le passé et qui n’a pas été fait. Donc, nous en sommes rendus là.»

Comment procédez-vous pour analyser le débit des eaux usées?

«On met des caméras dans les réseaux d’égout. C’est quelque chose qu’on ne peut pas faire à n’importe quel moment dans l’année. Il y a des temps précis. Le but est de mesurer en temps de pluie pour voir la capacité du réseau et déterminer où sont les infiltrations. C’est un processus qui va bon train et j’ai grand espoir qu’on va commencer à assouplir le moratoire vers le prochain budget. Je ne m’engage pas que ce sera fait, mais j’ai très bon espoir.»

Que se passe-t-il avec le projet controversé de La-Prairie-sur-le-Golf ?

«Ce projet-là est canné en bon français. C’est important de bien le comprendre. Deux semaines avant les élections de 2017, la Ville s’est engagée dans un protocole d’entente avec le promoteur. Cela venait essentiellement menotter l’avenir du golf. La raison pour laquelle ç’a été aussi long avant le début de la construction, c’est que ça prenait l’approbation du ministère de l’Environnement pour que le projet puisse aller de l’avant, puisque le golf est situé en zone inondable. Finalement, en avril 2021, le ministère a accordé son certificat d’autorisation au projet. Mais en février 2022, nos ingénieurs internes et externes nous ont dit qu’on ne pouvait pas aller de l’avant parce que le réseau ne fournit pas.

Pour que le ministère donne son accord au projet, il a fallu régler la question du remblai de la digue le long de la rivière Saint-Jacques jusqu’à la rue du Maire. Par contre, cette digue-là n’a pas été construite à des fins de protection d’un milieu bâti. Elle a été construite à des fins récréotouristiques. Si un jour il fallait qu’il y ait une crue des eaux de la rivière Saint-Jacques, cette digue-là n’est pas en mesure de protéger. Il y a eu des négociations et mon prédécesseur a décidé de prendre possession de la digue. Le processus n’est pas terminé encore, mais essentiellement la Ville prend possession du lot et prend en charge son entretien.»

Avez-vous reparlé aux promoteurs qui ont coupé trop d’arbres ?

«Oui, mais le mal est fait. Nous avons mis à jour nos règlements d’urbanisme qui dataient de 2009. Les amendes qui étaient minimes ont été mises à jour et sont maintenant salées. Au bout de la ligne, ce projet-là est canné. Quand le moratoire sera entièrement levé, ce projet-là ira de l’avant.»

Avez-vous l’impression de devoir faire face à plusieurs enjeux ?

«M. Gervais, si je dois définir ma première année, on règle des problèmes auxquels on ne s’attendait pas. Le moratoire et toute la question des eaux sanitaires sont en première ligne, mais aussi il y a eu l’entente au niveau de la Régie intermunicipale de police Roussillon. Au niveau de l’Office municipal d’habitation de Roussillon Est, il était en train de se désintégrer. Il a fallu se mettre sur ce dossier-là. Ça, c’est grâce à notre conseillère Sylvie Major qui investit beaucoup de son temps pour avancer là-dedans. Nous sommes en train de créer un nouvel Office municipal de Roussillon. La courbe d’apprentissage a été raide, mais on est là pour ça. Comme je dis souvent maintenant, je pense que La Prairie est à la croisée des chemins. On a des infrastructures qui sont désuètes. Sans infrastructures adéquates, c’est impossible de continuer le développement de la Ville. Nous sommes donc là pour jeter des bases solides pour que la Ville puisse continuer à se développer.»

Selon vous, est-ce que les citoyens comprennent cette réalité ?

«La Ville fait ce qu’elle a à faire pour publier des communiqués afin d’expliquer la situation. On constate que ce n’est pas tout le monde qui prend la peine d’aller les lire. Si je me fie aux Samedis du maire, je vous dirais qu’une personne sur deux sait qu’on est en moratoire. Et sur cette personne, il y en a une sur deux qui ne sait pas exactement pourquoi et comment. C’est sûr que ça fait partie de nos défis. D’ailleurs, un de nos projets pour 2023 est de mettre en place une plateforme de consultation publique en ligne qui va nous permettre de communiquer avec les gens. Pas seulement juste pour leur demander leur opinion, car ce n’est pas à moi de décider où on va mettre le prochain parc à chiens par exemple. On tient absolument à cette plateforme pour pouvoir sonder les gens que ce soit sur le parc à chiens, sur des règlements d’urbanisme ou sur des questions d’aménagement global du territoire. Je crois que c’est ça qui manque à La Prairie. Une vision globale de l’aménagement du territoire. Où est-ce qu’on est prêt à développer? Qu’est-ce qu’on veut protéger? On ne peut pas rester dans le statu quo. La dernière chose que je veux faire sur la planète c’est de réimposer des augmentations de taxes de 9,84%. C’était une hantise cette affaire-là. À La Prairie, une de nos plus grandes faiblesses, c’est que 84% de nos revenus proviennent des taxes résidentielles. Varennes par exemple, c’est 40%. Elle a été capable de décréter un gel de taxes cette année. La mission du nouveau conseil est d’essayer de se défaire de cette dépendance aux taxes résidentielles et de favoriser du commercial et de l’industriel léger. Ça ne se fait pas en un claquement de doigts.»