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Ses créations voyagent de Kahnawake à New York

le samedi 25 février 2023
Modifié à 14 h 52 min le 22 février 2023
Par Vicky Girard

vgirard@gravitemedia.com

Karonienhawe Diabo (au centre de la photo) a appris son métier d’elle-même, avec les enseignements de membres de sa famille et de sa communauté. (Photo gracieuseté: Jane Feldman)

La couture n’était qu’un passe-temps pour Karonienhawe Diabo lorsqu’elle était enfant. De fil en aiguille, sa passion est devenue une carrière. En février, la résidente de Kahnawake a participé à la semaine de la mode de New York, où des mannequins de sa communauté l’ont accompagnée pour parader dans une vingtaine de ses créations, empreintes de la culture mohawk.

«Je veux éduquer les gens sur notre culture à travers mes créations. Je veux qu’ils comprennent pourquoi j’utilise certaines couleurs et images dans mes vêtements», dit d’emblée Mme Diabo.

Celle-ci décrit son esthétique comme une approche novatrice du style mohawk, à la fois moderne et traditionnelle. 
On retrouve par exemple dans ses vêtements les coquillages du wampum, des représentations de clans des premières nations, le cycle lunaire ou encore les fraises. 

«Ce sont des choses qui sont importantes et des symboles pour nous. Les coquillages du wampum étaient une monnaie d’échange utilisée dans les traités et les guerres, il y a aussi le silex qui représente le peuple mohawk. Puis, nous avons une cérémonie et un festival dédié aux fraises, alors ce sont des éléments très significatifs que j’utilise», détaille l’artiste de 32 ans. 

« Je suis d’une autre génération de couturières et de créatrices, alors je veux apporter du nouveau en rendant hommage à ceux qui m’ont appris.»
-Karonienhawe Diabo

Mme Diabo voit ses créations comme une manière de transmettre son savoir et sa culture de multiples manières, une chose qu’elle considère primordiale. 

«La seule façon de garder nos traditions et notre art en vie est de se les enseigner entre nous», affirme celle dont les vêtements sont majoritairement faits à la main. Plusieurs jours sont nécessaires pour confectionner un morceau. 

D’une passion à une entreprise

Mme Diabo coud depuis l’âge d’environ 8 ou 9 ans. Lorsqu’elle a eu des enfants, elle a réalisé qu’elle pouvait faire de son talent son gagne-pain, tout en lui permettant d’être mère à la maison.

«On me contactait pour passer des commandes, j’ai donc voulu faire connaître mon nom professionnellement et les réseaux sociaux se sont avérés être la voie pour que tout se mette en place. J’ai réussi à atteindre des gens d’un peu partout en Amérique du Nord et ç’a décollé», se souvient-elle.

En 2017, l’artiste a créé son entreprise She Holds the Sky, soit la signification de son prénom en anglais. 

Quelques mois plus tard, une amie cherchait des créateurs pour un défilé à Ottawa. 

«Je me suis portée volontaire sans trop savoir dans quoi je m’embarquais, confie Mme Diabo en rigolant. J’avais environ cinq morceaux à présenter. C’était un gros événement. J’ai su à ce moment que je voulais continuer et m’améliorer.» 

Après plusieurs défilés, elle a soumis sa candidature pour la semaine de la mode à New York. Lorsque l’artiste a reçu une réponse positive, elle n’y croyait pas. 

«Je ne l’ai dit à personne la première journée. Je leur ai même écrit pour leur demander s’ils étaient certains que c’était moi qu’ils avaient sélectionnée», relate Mme Diabo. 

Elle partage que c’était une expérience incroyable, autant pour elle que pour les 18 mannequins de Kahnawake. Un danseur de La Prairie, Jean-Michel Dieket, était également du nombre.  

À la mode autochtone

Mme Diabo souligne que le domaine de la mode s’ouvre à la culture autochtone, l’accueille et lui fait la place qui lui revient. Elle remarque aussi que la société «se réveille» sur l’appropriation qui se faisait en portant certains vêtements qui s’avéraient être offensants pour les Autochtones. Les symboles de la culture des Premières nations sont maintenant portés et représentés de façon plus authentique, selon elle.

«C’est beau de voir qu’il y a même un besoin pour cela maintenant. Beaucoup d’Autochtones veulent voir leur culture sur les passerelles et ça s’applique aussi aux stylistes, maquilleurs, coiffeurs et mannequins autochtones qui se réunissent. Il y a tellement de talent dans nos communautés», partage-t-elle.

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